
Le règlement intérieur, acte unilatéral ou document négocié?
DR/Khelifi Abderrahmane
Faculté de droit et des sciences politiques université de souk – Ahras / Algerie
Maitre de conference et membre du conseil d’administration et d’éthique
Vice rédacteur en chef de la revue économie et droit
Expert droit public au sein de la CRUEST
مقال نشر في مجلة جيل الأبحاث القانونية المعمقة العدد 15 ص 129.
الملخص:
تلعب الأنظمة الداخلية دورا بالغ الأهمية في ضبط مسائل ذات طابع مهني، باعتبار النظام الداخلي وثيقة يعدها المستخدم ويعرضها على ممثلي العمال لإبداء الرأي، وهذا قبل عرضه على مفتش العمل المختص للتأشير عليه وتسجيله بأمانة ضبط المحكمة المختصة.
قانون العمل الجزائري (القانون 90/11) أوجب على كل مستخدم يشغل عشرين(20) عاملا فأكثر أن يمسك نظاما داخليا، يحدد فيه لزوما القواعد المتعلقة بالتنظيم التقني للعمل والوقاية الصحية والأمن والانضباط.
الدراسة الحالية ستسلط الضوء على الأهمية التي أضفاها المشرع على هذه الوثيقة في المجال التأديبي مع الدور الجديد الذي أنيط بالمؤسسات العمومية الاقتصادية في ظل حركية اقتصادية غير مستقرة.
الكلمات المفتاحية
نظام داخلي – مجال الانضباطي – عقوبات تأديبية – أخطاء مهنية – لجنة التأديب – مفتش العمل.
Résume :
Les règlements intérieurs revêtent une importance extrême dans le monde du travail, ce sont des documents établis par les employeurs et soumis à la signature des représentants des travailleurs, avant d’être soumis au visa de l’inspecteur du travail et enregistrés auprès du tribunal compétent.
Le code Algérien du travail (la loi 90/11) dans son article 75 oblige tout employeur n’importe quel secteur d’activité employant 20 travailleurs et plus à tenir un règlement intérieur, par lequel l’employeur fixe obligatoirement les règles relatives à l’organisation technique du travail, à l’hygiène, à la sécurité et à la discipline .
La présente étude va mettre l’accent sur l’importance des règlements intérieurs dans le domaine disciplinaire tout en tenant compte du nouveau rôle de l’entreprise publique dans un climat économique non stable, pour conclure la nature de ce document (acte unilatéral ou document négocié) .
Mots clés :
Règlement intérieur – volet disciplinaire – sanctions – fautes professionnelles – commission de discipline – inspecteur du travail.
Introduction:
Le droit Algérien du travail a connu un changement radical en matière de discipline des travailleurs salariés. Trois étapes marquent son évolution.
La première étape commence après l’indépendance de 1962 jusqu’à 1971, période transitoire ayant connu la promulgation de la loi 62/153 autorisant le travail avec la réglementation française sauf celle contraire à la souveraineté et l’indépendance nationale.
La deuxième étape est inaugurée par la promulgation de l’ordonnance 71/ 74 relative à la gestion socialiste des entreprises (système socialiste), puis la promulgation de la loi n° 78-12 du 05/08/1978 relative au statut général du travailleur, loi n° 82-06 du 27 février 1982 relative aux relations individuelles de travail et l’ensemble des textes réglementaires pris pour leur application, notamment et le décret n° 82-302 (du 11 Septembre 1992 relatif aux modalités d’application des dispositions législatives concernant les relations individuelles du travail) et le décret n° 85-59 (du 23 Mars 1985 portant statut type des travailleurs des institutions et administrations publiques).
Cette étape s’étendra jusqu’à l’année 1990, un régime statutaire a été imposé durant cette étape caractérisé par l’intervention de l’état dans tous les domaines du travail surtout dans le volet disciplinaire.
La troisième étape commence à partir de l’année 1990, année de la promulgation des lois sociales[1], connue par le régime contractuel ou conventionnel, le règlement intérieur est devenu une obligation dans les entreprises ou établissements employant habituellement au moins 20 salariés. Il y a lieu de préciser que les règlements intérieurs existaient sous l’empire des dispositions antérieures à la réforme de 1990 mais étaient sans aucun effet et ce par rapport à l’intervention de l’état.
En effet, la nouvelle conception et les réformes économiques ont imposé d’autres mécanismes de gestion des entreprises selon les dispositions édictées par les lois sur l’autonomie.
Le responsable de l’entreprise (l’employeur) dispose actuellement de trois pouvoirs fondamentaux à savoir:
– pouvoir de direction,
– pouvoir de surveillance,
– pouvoir de contrôle.
L’élaboration du règlement intérieur et l’exercice du pouvoir disciplinaire sont devenu du ressort de l’employeur, et c’est au règlement intérieur qu’il revient d’identifier les manquements dans la vie professionnelle (les fautes professionnelles).
Ainsi, la nouvelle loi laisse le soin à l’employeur de fixer la qualification des fautes professionnelles. Dans une conception réductrice et restrictive, la discipline est désormais associée exclusivement aux termes de l’article 77 de la loi n° 90-11 relative aux relations de travail complétée et modifiée.
La présente étude a pour objet de démontrer l’importance de cet outil dans le monde du travail, et de déterminer les limites de l’intervention de l’état dans l’exercice du contrôle a priori et a posteriori sur ce document, en examinant si la volonté des partenaires sociaux est sans limites, et si l’intervention de l’état reste toujours existante.
La Présente étude va aborder les points suivants :
1- La nature juridique du règlement intérieur
2- Définition du volet disciplinaire
3- La procédure disciplinaire
4- Le contrôle des règlements intérieurs
Conclusion.
1- La nature juridique du règlement intérieur Le règlement intérieur est un acte unilatéral de l’employeur, c’est-à-dire un acte résultant de sa seule volonté, qui s’impose à tous les salariés de l’entreprise, sans qu’il soit nécessaire de rechercher s’ils y sont souscrits ou non.
Il s’agit donc d’un document qui fait office de « loi » dans l’établissement. Il s’impose à tous, aux membres du personnel comme au chef de l’entreprise[2].
Cette définition ne précise pas les domaines traités par les règlements intérieurs et leurs natures juridiques.
Une autre définition considère que le règlement intérieur est un document écrit rédigé par l’employeur et signé par le représentant des travailleurs légalement élu ou par le délégué syndical[3].
La même critique de cette définition, puisque il ne démontre pas la nature juridique des règlements intérieurs, et leurs contenus.
De notre part, nous estimons que la meilleure définition doit comprendre la nature des règles de procédure et son champ d’application, de sorte que le document règlement intérieur est un document professionnel élaboré par l’employeur et soumis pour approbation aux représentants des travailleurs, il fixe les règles relatives à l’organisation technique et les conditions de travail , le volet disciplinaire , ainsi que les mesures de prévention des risques et la médecine et la sécurité au travail, il n’est pas applicable avant son approbation par inspecteur du travail et son dépôt auprès du tribunal compétent.
L’employeur assure une large publicité en direction des travailleurs concernés.
C’est l’expression du pouvoir patronal, même s’il doit être obligatoirement soumis à l’avis des représentants du personnel avant d’entrer en vigueur, l’employeur n’est pas tenu de suivre leur avis[4].
C’est un acte qui se définie, d’abord, par son contenu, non par sa forme ou sa portée. Relève du règlement intérieur toute disposition générale et impersonnelle prise par l’employeur[5].
Le règlement intérieur fixe exclusivement les mesures d’application de la réglementation en matière d’hygiène et de sécurité dans l’entreprise ou l’établissement, les conditions dans lesquelles le salarié peut être appelé à participer à rétablissement des conditions de travail protectrices de la santé et de la sécurité des salariés lorsqu’elle est comprise, les règles générales et permanentes de discipline et, notamment, la nature et l’échelle des sanctions[6].
Il énonce en outre les dispositions relatives aux droits de la défense des salariés et rappelle les dispositions relatives à l’abus d’autorité en matière sexuelle[7].
Le règlement intérieur est obligatoire dans toutes les entreprises employant 20 salariés au moins.
Pour apprécier le seuil de 20 salariés, il faut que celui-ci ait été atteint ou dépassé dans les 6 mois de l’ouverture de l’entreprise ou de l’établissement[8].
Sont pris en compte tous les salariés liés par un contrat de travail à durée déterminée ou indéterminée en cours ou suspendu, y compris les travailleurs à domicile. La détermination des effectifs des salariés à temps partiel s’effectue au prorata de leur temps de travail, alors que pour les travailleurs temporaires, l’effectif est calculé en fin d’exercice. Sont exclus les apprentis les contrats d’aide à l’emploi des jeunes, les contrats de formation et les travailleurs détachés[9].
Une entreprise employant moins de 20 travailleurs peut mettre en œuvre facultativement un règlement intérieur, dans ce cas, le chef d’établissement est tenu de respecter toutes les règles d’élaboration d’un règlement intérieur établies par le Code du travail pour les établissements de plus de 20 salariés.
Si l’entreprise est divisée en plusieurs établissements d’au moins vingt salariés, un règlement intérieur particulier doit être rédigé dans chacun d’eux. Cependant, l’employeur ne peut élaborer qu’un seul document pour l’ensemble de l’entreprise, dès lors qu’il n’existe pas de circonstances justifiant que des dispositions particulières soient prises pour telle ou telle entité[10].
Le contenu du règlement intérieur
Le contenu de discipline s’étend à toutes les règles de conduite communes aux membres d’un collectif de travailleur et intéressant de manière générale la vie dans l’entreprise, depuis la réforme de 1990, la liberté dont jouit le chef d’entreprise dans l’élaboration du règlement intérieur est considérable, malgré que son pouvoir ne soit pas discrétionnaire.
La mise en œuvre d’un règlement est soumise à une procédure impérative qui impose à l’employeur une consultation, des représentants du personnel, ainsi qu’un contrôle administratif de légalité et des mesures de publicité[11].
Le règlement intérieur, obligatoirement document écrit, fixe exclusivement :
1- Les conditions de travail (l’organisation technique du travail).
2- Le volet disciplinaire (les règles générales et permanentes relatives à la discipline (droit à la défense des salariés, échelles des sanctions…),
3- L’hygiène, la sécurité et la médecine de travail.
Après rédaction du règlement intérieur l’employeur le soumet pour avis aux organes de participation ou, à défaut, aux représentants des travailleurs avant sa mise en œuvre, puis il doit déposer un exemplaire au niveau de l’inspection de travail territorialement compétente pour approbation de conformité avec la législation et la réglementation du travail dans un délai de huit ( 8 ) jours.
Il y a lieu de préciser que les clauses de règlement qui supprimeraient ou limiteraient les droits des travailleur sont nulles et de nul effet[12].
2– Définition du volet disciplinaire
La possibilité pour l’employeur de prendre des sanctions à l’encontre des salariés est un droit dont la légitimité n’est pas discutée, puisque c’est la loi qui en est le fondement. Ce droit ne permet pas de sanctionner le salarié que dans la mesure où celui-ci n’a pas respecté les règles et les instructions que l’employeur était fondé à prendre dans le cadre de son pouvoir de direction, ce pouvoir s’étend à toutes les questions concernant les domaines de la discipline notamment la qualification des actes fautifs, l’échelle des sanctions et la procédure disciplinaire.
A- Les fautes professionnelles
La notions de faute disciplinaire, consiste à déterminer par l’employeur les agissements fautifs des employés au regard des règles et normes établies pour assurer le bon fonctionnement de l’entreprise.
Il n’existe aucune définition légale de la faute disciplinaire, l’employeur a une grande liberté d’appréciation des comportements qu’il tient pour fautifs[13], c’est lui qui possède le pouvoir d’incrimination. Selon la doctrine la faute disciplinaire est la « violation par un travailleur des obligations professionnelles résultant de la discipline ». Il s’agit donc du non-respect des règles de discipline[14].
L’article 77 de la loi 90/11 fait obligation à l’employeur de fixer dans le règlement intérieur la qualification des fautes professionnelles[15].
La faute professionnelle désigne l’irrégularité qu’un salarié pourrait commettre par rapport à des normes de conduites qui s’impose à tous, sinon, aux membres d’une catégorie professionnelle[16].
Il y a lieu de distinguer entre faute professionnelle et faute disciplinaire et faute contractuelle. Quelles que soient le terme employé et le qualificatif utilisé, une certitude demeure, qu’un comportement du salarié ne constitue une faut susceptible d’une sanction disciplinaire que lorsqu’il correspond à des faits préalablement définis, et qualifiés de « fautes » par l’employeur lui-même au règlement intérieur.
Généralement l’employeur ne se limite pas à qualifier et énumérer les comportements considérés comme faute mais aussi a les classer selon leurs degrés de gravité.
La majorité des entreprises s’inspire des trois degrés du décret 82-302 relatif à la mise en application de la loi 82-06 (loi antérieur à la loi 90/11) notamment l’article 68 qui classe les fautes professionnelles, sans préjudice de leur qualification pénale, en trois catégories : fautes du 1er degré, fautes du 2éme degré, fautes du 3éme degré[17].
La notion de faute est trop vaste et bien trop complexe. Il existe une multitude de fautes dont la définition sera différente selon son auteur, sa gravité et ses conséquences.
On distingue ainsi la faute légère, la faute grave et la faute lourde… l’appréciation de l’existence d’une faute et de son degré de gravité relevant de l’appréciation des juges[18].
La notion de faute peut être définie afin de déterminer la responsabilité du salarié en fonction de la faute commise[19].
La jurisprudence et la doctrine distingue entre trois types de fautes professionnelles : – fautes simples (légères). – fautes lourdes. – fautes inexcusables.
La nouvelle loi porte une nouvelle approche du pouvoir disciplinaire de l’employeur, à l’inverse des textes en vigueur avant 1990 ou l’employeur n’était qu’un fonctionnaire soumis au régime statutaire exécutant les instructions de la tutelle.
La nouvelle loi laisse le soin à l’employeur de fixer la qualification des fautes professionnelles, sous le contrôle de l’inspecteur de travail. Dans une conception restrictive, la discipline serait associée exclusivement aux termes de l’article 77 de la loi n° 99-11[20].
En entend par faute professionnelle, tout comportement contraire aux obligations du travailleur, dans l’exercice de ces fonctions et sa relation avec l’employeur et ses collègues travailleurs, ainsi que tout manquement aux règles d’hygiène et de sécurité et atteinte aux normes de travail[21][25].
L’employeur classe les fautes en trois degrés selon leurs gravités tout en respectant le contenu de l’article 73 modifié par la loi 91/29 en matière de fautes graves commises par le travail[22].
Nous signalons enfin, que la qualification des faits présumés graves ne peut être opérée qu’en adéquation avec leur incrimination par un texte officiel ou même le règlement intérieur[23].
De façon générale tout employeur est libre de déterminer les fautes professionnelles, cette détermination est soumise au contrôle de l’inspection du travail territorialement compétant.
B- Les sanctions disciplinaires
Comme pour les actes fautifs, le législateur n’a donné aucune définition à la sanction, il a laissé le soin à l’employeur d’établir, dans le règlement intérieur, la liste des sanctions par degré de gravité, susceptibles d’être infligées aux salariés, néanmoins avec la transposition du principe de légalité des délits et des sanctions, et la garantie des droits des salariés prévus par le droit de travail Algérien, tels que : – l’égalité entre la sanction et les fautes. – l’interdiction du cumul de sanction (une faute une sanction). – pas de sanctions de même degré pour des faits différents. – prendre en charge les dispositions impératives et les qualifications des fautes du 3éme degré et des fautes graves et lourdes qui entrainent les licenciements disciplinaires.
Contrairement à l’ancienne réglementation qui établie les sanctions en trois degrés, la nouvelle loi n’empêche pas l’employeur d’imaginer d’autres types de mesures
Les mesures disciplinaires (les sanctions) ont pour effet d’affecter la rémunération des salariés, leurs fonctions, leurs carrières ou leurs présences dans l’entreprise.
En entend par sanction les mesures coercitives prises à l’encontre du travail fautif, ce volet est aussi laissé à l’initiative de l’employeur tout en respectant l’art. 73 de la loi 73 modifiée par la loi n° 91-92 et l’ordonnance n° 96-21 en matière de licenciement individuel pour faute grave avec ou sans préavis ni indemnité.
L’employeur doit tenir compte des mesures de protection prévues par la loi et les principes requis par la doctrine et la jurisprudence tel que :
– Principe d’égalité entre faute et sanction ;
– Principe de droit de défense ;
– Principe de légitimité de la procédure de sanction.
L’employeur détaille les sanctions par degré, l’inspecteur du travail et le tribunal peuvent intervenir en cas de non-conformité ou non respect aux dispositions légales.
Si l’employeur a le pouvoir disciplinaire, tout ne lui est pas non plus permis. Ainsi, toute sanction pécuniaire est interdite par la loi, ce principe légal et jurisprudentiel est universel. Le code de travail français, art. L. 122.42 stipule que toute disposition ou stipulation contraire est réputée non écrite et de nul effet. Le non-respect de cette interdiction est puni d’une amende de 3 750 € et, en cas de récidive, d’une amende de 7 500 € (c. trav. art. L. 152-1-5).
3 -La procédure disciplinaire
En vertu du droit de direction détenu par l’employeur, il est souverain de proposer la procédure en matière de discipline tout en tenant compte des dispositions légales notamment citées dans les art. 73.1 et 73. 2.
Toute procédure contraire aux dispositions suscitées entraine la nullité[24] [29].
Le volet disciplinaire est soumis au contrôle de l’inspection du travail en cas de litige au contrôle du juge social[25].
Tout en privilégiant le règlement intérieur pour organiser la procédure disciplinaire, la loi n’exclut pas que ce rôle puisse être tenu par la convention collective, sans toutefois qu’elle contient des dispositions contradictoires.
L’article 120 de loi n° 90-11 prévoit le champ d’intervention et les domaines que doit traiter la convention collective, sans toutefois citer le volet disciplinaire. C’est pourquoi la procédure disciplinaire fait souvent l’objet de prescription dans le règlement intérieur[26].
L’initial de la loi n° 90-11 promulgué le 21 avril 1990 a laissé le soin à l’employeur de tracer les procédures disciplinaire, deux raisons ont poussé le législateur à intervenir, la première c’est la non compréhension de la majorité des employeurs de leur limite en matière disciplinaire, la deuxième c’est le caractère protecteur du droit de travail, ces deux raisons et la pression des structures syndicales, sont la cause de la première modification de la loi n° 90-11 par la loi n° 91-29 puis de la deuxième modification et complément de la loi par l’ordonnance n° 96-21.
Les amendements ont porté des règles impératives en matière disciplinaire que l’employeur doit respecter et prévoir dans le règlement intérieur, sous peine de nullité et refus par l’inspecteur du travail.
Les modalités de la procédure prennent en compte la gravité des sanctions envisagées. La procédure est extrêmement simplifiée par les sanctions du 3éme degré, l’employeur doit respecter les règles impératives légales et celles contenues dans le règlement intérieur ou à caractère conventionnelle[27].
L’égalité de la procédure consiste à respecter les étapes suivantes :
1- L’audition du salarié ;
2- La notification du licenciement ;
3- Le respect des procédures spéciales des salariés spécialement protégés (délégués, représentants du personne.
4- Le contrôle du règlement
Il existe deux types de contrôle, le premier est administratif et technique exercé par l’inspection du travail, le deuxième est exercé par la justice du travail.
A- Le contrôle administratif
L’approbation de conformité « visa » implique d’abord, que l’inspecteur du travail s’assure du respect des conditions de l’élaboration du règlement intérieur, notamment la consultation des représentants du personnel par l’employeur. L’inspecteur du travail doit également vérifier que le contenu du règlement correspond bien à chacun des domaines déterminés par l’art. 77 de la loi n° 90-11.
Sur le fond, l’inspecteur veille à la conformité du règlement intérieur, aux lois et règlements ainsi qu’aux conventions et accords collectif. Ce qui signifie que l’inspecteur du travail s’assure que les règles qu’il contient ne sont pas en opposition avec les prescriptions légales. Légalement et en vertu des prérogatives qui lui sont conférées par la loi n° 90-03 du 6 février 1990 relative à l’inspection du travail, ce dernier peut instruire l’employeur pour se conformer avec la loi, ce qu’on appelle contrôle de conformité[28].
L’inspecteur peut demander, selon le cas, le retrait ou la modification d’une ou plusieurs clauses contraires à la loi ou que soient ajoutées des dispositions. En vertu des prérogatives qui lui sont conférées par la loi 90/03, il a le droit absolu de refuser le visa en cas de violation, par l’employeur, d’une règle impérative en matière des règlements intérieurs (élaboration, consultation des représentants des travailleurs, visa inspection du travail, dépôt tribunal…).
Au cas de refus ou de réserve émis par l’inspecteur de travail le PV d’infraction ou la décision est notifiée à l’employeur par écrit. Le règlement intérieur n’est pas applicable tant que l’employeur n’a pas obtenu de l’inspecteur du travail la décision d’approbation de conformité[29]. Nous signalons que la loi n’a pas prévu aucun moyen de recours de ce dernier contre la décision de l’inspecteur de travail[30].
B– Le contrôle judiciaire
Le tribunal siégeant en matière sociale en vertu des articles de 500 à 510 du code de procédures civiles et administratives peut intervenir pour apprécier la légalité du règlement intérieur, la loi n’a pas cité expressément la procédure de saisie du tribunal, est-ce que ce droit est attribué au syndicat ou au représentant des travailleurs qui a signé le règlement intérieur, ou n’importe quel travailleur ayant intérêt pour engager une action dans ce sens.
Toute requête introductive doit être conforme aux règles prévues par le code de procédures civiles et administratives (loi n° 08-09 du 25/02/2008)
Entre autre le tribunal en cas de litiges peut ne pas prendre considération une clause ou un article non conforme, même si le règlement intérieur est visé par l’inspecteur du travail, et enregistré au niveau du greffe du tribunal compétant, dans ce cas les dispositions légales et réglementaire sont applicables d’office. Le contenu interdit du règlement intérieur est de deux ordres :
Sont, d’abord et de manière générale, interdites toutes les dispositions qui ne relèvent pas du contenu exclusif du règlement intérieur : l’interdiction résulte de l’interprétation a contrario des dispositions régissant le contenu exclusif du règlement intérieur sont ensuite prohibées les dispositions qui, quoique relevant du domaine du règlement intérieur, sont spécialement écartées par la loi[31].
Conclusions
Il est clair que le règlement intérieur en tant qu’un document écrit exprime d’une part la volonté de l’employeur de protéger l’entreprise ,tout en respectant, d’autre part, les règles de fond(contenu du règlement intérieur) et les conditions de forme(signature du représentant des travailleurs-visa inspecteur du travail-enregistrement tribunal compétent). Cela n’est pas pour autant un abandon du législateur de son rôle dans la protection des travailleurs, mais vu le caractère d’obligation de la règle de droit du travail, le législateur persiste à intervenir dans plusieurs aspects du règlement intérieurs qui ont été mentionnées dans le corps de cette étude.
Cependant, nous avons été amenés à faire quelques observations intéressantes:
1- On maintenant sa domination sur ce document, le législateur réduit le rôle des chefs d’entreprises, il assujettit leurs actions aux aspects contractuels des règles du droit du travail.
2- L’intervention de l’inspecteur du travail, est une sorte de tutelle administrative, le législateur doit limiter son champ d’intervention, et déterminer exclusivement son rôle de contrôle sur les règlements intérieurs.
3- Il n’y a pas d’article dans la législation du travail qui exige expressément que le règlement intérieur doit contenir des dispositions relatives aux harcèlements moral et sexuel.
4- Il y a un seul article du Code du travail, l’article 147 de l’Algérien qui dispose que « Toute infraction aux dispositions de la loi relatives à l’obligation légale de dépôt du règlement intérieur auprès de l’inspection du travail et du greffe du tribunal compétent, est punie d’une amende de 1.000 à 2.000 DA ». Le montant de l’amende est très dérisoire pour être dissuasif il faut revoir cette amende à la hausse
5- Le législateur s’est trop immiscé dans le volet disciplinaire, la liberté des patrons et très limitée par le caractère impératif des dispositions du code de travail, le non respect de ces derniers implique la non approbation (le refus de visa) du règlement intérieur.
6- Le législateur n’a pas prévu de solution au cas où le délégué du personnel la contresignature du règlement intérieur, la situation reste ambigu flou.
7- Il n’y a pas d’article dans le code du travail qui donne expressément un délai à l’inspecteur du travail pour notifier à l’employeur ses observations et lui demander de se conformer aux dispositions législatives en vigueur.
8- L’art 500 du code de procédures civiles et administratives stipule que : « la section sociale a compétence exclusive dans les matières suivantes : …… 7- contentieux relatifs aux conventions et accords collectifs de travail ». L’article porte sur les conventions et accords collectifs de travail, et ne traite pas des règlements intérieurs, est ce par inadvertance ou omission délibéré ?. A signaler que la cour suprême en Algérie a considéré plusieurs fois que les contentieux des règlements intérieurs revient à la juridiction sociale et non pas la juridiction administrative comme il est le cas en France.
Liste bibliographique:
Les textes juridiques
Les textes législatifs
– Loi 78/12 du 05 Aout 1978 relative au statut général du travail.
– Loi 82/06 du 27 Février 1982 relative aux relations individuelles de travail.
– Loi 88/07 du 26 Janvier 1988 relative à l’hygiène et sécurité.
– Loi 90/03 du 06 Février 1990 relative à l’inspection du travail, modifiée et complétée.
– Loi 90/04 du 06 Février 1990 relative au règlement des conflits individuels de travail, modifiée et complétée.
– Loi 90/11 du 21 Avril 1990 relative aux relations du travail, modifiée et complétée.
– Loi 08/08 du 25 février 2008 relative au contentieux de sécurité sociale.
– Loi 08/09 du 25 février 2008 relative au code de procédures civiles et administratives
Les textes règlementaires
– Décret 82/302 du 11 Septembre 1982 relatif aux modalités d’application des dispositions législatives.
– Décret 85/59 du 23 Mars 1985 portant statut type des travailleurs des administrations et institutions publiques
Les ouvrages
En français
– Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 2001.
– KORICHE Mohammed Nasser Eddine, Droit du travail, T1, Alger, OPU, 2009.
– KORICHE Mohammed Nasser-Eddine, Droit du travail, T2, Alger, OPU, 2009.
– LANGE Daniel, Roulet Vincent, Droit du travail, 2 éd, Ellipses, Paris, 2012.
– PANAYE Yannick, Droit du travail et sa jurisprudence commentée, Tissot éditions, Paris, 2012.
En arabe
– Baali(M.S), droit du travail en Algérie, Maison El Ouloum, Annaba, Algérie, 2003, (version arabe).
– Benazouz(s), précis en droit du travail, Maison El Khaldounia, Alger, 2008, (version arabe).
– Benhsain(M), Le Droit Social Magrébin, Relations De Travail Individuelles Et Collectives, première partie, Edition 2015, Top Presse, Rabat, 2015, (version arabe).
– Dib(A), Droit du travail sous les reformes économiques, Maison el casbah, Alger, 2003, (version arabe).
– Hadfi(B), précis en droit du travail, 2eme édition, Maison Jousour, Alger, 2016, (version arabe).
– Khelifi(A), Code du Travail Argumenté, El Dar El Othmania, Alger, 2016. (version arabe).
– Khelifi (A), La justice du Travail, El Dar El Othmania, Alger, 2016 . (version arabe).
[1] Loi n° 90-11 du 21 avril 1990 relative aux relations de travail complétée et modifiée par :
– la loi n° 91-29 du 21 décembre 1991,
– le décret législatif n° 94-03 du 11 avril 1994,
– l’ordonnance n° 96-21 du 9 juillet 1996,
– l’ordonnance n° 97-02 du 11 janvier 1997
– et l’ordonnance n° 97-03 du 11 janvier 1997
2PANAYE Yannick, Droit du travail et sa jurisprudence commentée, Tissot éditions, Paris, 2012, p. 625
-Voir :.Khelifi (A), Code du Travail Argumenté, El Dar El Othmania, Alger, 2016, pp.108-110 (version arabe).
– .Benhsain (M), Le Droit Social Magrébin, Relations De Travail Individuelles Et Collectives, première partie, Edition 2015, Top Presse, Rabat, 2015, p 26 et suite (version arabe).
3 Art. 75 loi n° 90-11.
4PANAYE Yannick, op.cit., p. 625
5 LANGE Daniel, Roulet Vincent, Droit du travail, 2 éd, Ellipses, Paris, 2012, p. 26.
6 Art. L. 1321.1 code du travail français.
7 LANGE Daniel, Roulet Vincent, op.cit. p. 26.
8Ibid, p. 625.
9 Idem, p 625 et suite
10 Juris Classeur Travail Traité > Fasc. 1-10 à 1-40 : SOURCES NATIONALES. – Présentation > III. – Sources professionnelles patronales > C. – Règlement intérieur (V. JCl. Travail Traité, Fasc. 1-40
11KORICHE Mohammed Nasser-Eddine, Droit du travail, T2, Alger, OPU, 2009, p. 134.
12 Art. 78 loi 90/11.
13 KORICHE Mohammed Nasser-Eddine, op cit., p. 145.
14Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 2001, p. 932.
15 Art. 77 de la loi 90/11 : « Art. 77 – Le règlement intérieur est un document par lequel l’employeur fixe obligatoirement les règles relatives à l’organisation technique du travail, à l’hygiène, à la sécurité et à la discipline. Dans le domaine disciplinaire, le règlement intérieur fixe la qualification des fautes professionnelles, les degrés des sanctions correspondantes et les procédures de mise en œuvre ».
-pour plus de détail, voir:
-Baali(M.S),droit du travail en Algerie, Maison El Ouloum,Annaba,Algerie,2003,p36 et suite(version arabe).
-Dib(A),Droit du travail sous les reformes économiques, Maison el cabah,Alger,2003,pp.199-206 -(version arabe).
-Hadfi(B),précis en droit du travail,2eme édition,Maison Jousour,Alger,2016;p37 -(version arabe).
-Benazouz( s), précis en droit du travail,Maison El Khaldounia,Alger,2008,p185 -(version arabe).
16 KORICHE Mohammed Nasser Eddine, op. cit., p. 147.
17Art. 68 Alenia 2 du décret 82-302.
-Voir Khelifi (A),La justice du Travail , El Dar El Othmania, Alger, 2016, p.63 et suite(version arabe).
18 PANAYE Yannick, op cit, pp. 332-333.
19La responsabilité peut être contractuelle, civile de droit commun ou pénal, cf. PANAYE Yannick. op.cit, pp. 332-333.
20 « Le règlement intérieur est un document par lequel l’employeur fixe obligatoirement les règles relatives à l’organisation technique du travail, à l’hygiène, à la sécurité et à la discipline. Dans le domaine disciplinaire, le règlement intérieur fixe la qualification des fautes professionnelles, les degrés des sanctions correspondantes et les procédures de mise en œuvre.»
21 Loi 88/07 du26/01/1988 relative à l’hygiène et sécurité.
22Voir Art. 73 (modifié par l’art. 1.2 de la loi n° 91-29).
23 KORICHE Mohammed Nasser Eddine, Droit du travail, T1, Alger, OPU, 2009, p. 222
24 Art. 73/3 de la loi 90/11.
25Loi 90/04 du 06/02/1990 relative aux règlements des conflits individuels, modifiée et complétée
Loi 08/09 du 25/02/2008 relative au code de procédures civiles et administratives notamment art. 500 à 510.
26 KORICHE Mohammed Naser-Eddine, op. cit.,p. 153.
27 Art. 73 de la loi n° 90-11 modifié par l’ordonnance 96-21
28Art. 12 de la loi n° 90-03 du 06/02/1990,relative à l’inspection du travail, modifiée et complétée.
29 Cette décision n’est pas un arrêté administratif indépendant, mais un visa sur le règlement intérieur pour permettre son dépôt au greffe du tribunal.
30 D’après LANGE Daniel, ROULET Vincent, op. cit., p. 29 : « si la loi n’impose pas à l’administration le contrôle effectif du règlement intérieur ainsi que l’émission d’une quelconque déclaration d’illégalité, l’injonction peut être adressé à tout moment, elle n’est enfermée dans aucun délai … à l’employeur de procéder aux modifications réclamées, sauf à exercer les voies de recours qu’offre le droit administratif, après recours gracieux devant l’inspecteur de travail lui-même ou bien un recours hiérarchique devant le directeur régional du travail et de l’emploi… le juge administratif est alors conduit à connaitre de la laïcité de cet acte règlementaire ».
31Ibid., p. 27.