إجراءات الدفاع عن العلامة التجارية في القانون المغربي
Les actions en défense de la marque en droit marocain
Actions in defense of the trademark under Moroccan law
ذ. كريم زواق/ جامعة سيدي محمد بن عبد الله ـ فاس، المغرب
Pr. Karim Zaouaq/Université Sidi Mohamed Ben Abdellah de Fès-Maroc
منشور في مجلة جيل الأبحاث القانونية المعمقة العدد 46 الصفحة 129.
الملخصلمحاربة الممارسات غير القانونية التي تؤثر على العلامة التجارية، التزم المغرب بالمعايير الدولية في هذا المجال، من خلال التكريس التشريعي للعديد من الإجراءات الإدارية والقضائية القادرة على ضمان دفاع أمثل عن حقوق مالكي العلامات التجارية.
الكلمات المفاتيح: العلامة التجارية – الدفاع – التزييف – المعارضة – المطالبة.ABSTRACT:
To fight against illegal practices that infringe trademarks, Morocco has aligned with international standards in this area, by enshrining in its legislation various administrative and judicial actions to ensure better defense of the rights of trademark owners.
KEY WORDS: Trademark – defense – infringement – opposition – claim.
RÉSUMÉ
Pour lutter contre les pratiques illégales portant atteinte à la marque de fabrique, de commerce et de service, le Maroc s’est aligné sur les standards internationaux en la matière, en consacrant dans sa législation divers actions administratives et judiciaires à même d’assurer une meilleure défense des droits des titulaires des marques.
MOTS CLÉS : Marque- défense- contrefaçon- opposition- revendication.
Introduction
S’entendant d’« un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale »[1], la marque de fabrique, de commerce et de service est sujette au Maroc à un encadrement juridique strict de par son utilité sur le plan économique et en termes de compétitivité des entreprises.
Ayant souscrit aux engagements découlant des principaux instruments internationaux applicables aux marques, notamment la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle de 1883, l’Arrangement de Madrid concernant l’enregistrement international des marques de 1891[2], le Protocole de 1989 relatif à cet accord[3], l’Arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques de 1957, le Traité sur le droit des marques de 1994 et la Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique de 2011, le Maroc[4] a conclu également plusieurs accords commerciaux et de libre échange prévoyant une obligation de protection de la propriété industrielle, dont les marques, notamment l’accord de libre échange Maroc-Tunisie de 1996 (art. 20), l’accord de libre échange Maroc-Jordanie de 1998 (art. 14), l’accord de libre échange Maroc-Égypte de 1998 (art. 14), l’accord d’Agadir créant une zone de libre échange euro-méditerranéenne de 2001 (art. 22), l’accord de libre-échange Maroc-États-Unis d’Amérique de 2004 (art. 15.2), l’accord de 2001 créant une zone de libre échange entre le Maroc et les Émirats arabes unis (art. 17), l’accord de libre-échange Maroc-Turquie de 2004 (art. 27).
De même, la défense de la marque qui est le dénominateur commun de tous ces accords, traités et conventions ratifiés par le Maroc, est régie dans la législation marocaine par la loi n° 17-97 du 15 février 2000 relative à la protection de la propriété industrielle, laquelle a été complétée et modifiée dans un premier temps par la loi n°31-05 du 14 février 2006 qui a introduit la procédure d’opposition et les mesures aux frontières en matière de propriété industrielle, puis par la loi n° 23-13 du 21 novembre 2014, ayant renforcé les actions répressives de la contrefaçon. À travers ces lois, le législateur marocain a cherché à « répondre à deux exigences essentielles, qui sont de protéger les marques contre toute forme de contrefaçon (c’est-à-dire toute forme d’utilisation par les contrefacteurs d’une marque identique ou similaire au point de prêter à confusion), et de réglementer tout usage de marque afin qu’elle ne puisse induire en erreur ou prêter à confusion »[5].
La défense de la marque revêt une importance toute particulière, en ce sens sa mise en œuvre effective permet de renforcer le tissu économique et d’attirer les investissements directs étrangers.
De ce fait, la problématique principale posée dans cet article est relative aux garanties offertes par le cadre juridique marocain en matière de défense de la marque. En d’autres termes, dans quelle mesure le législateur et le juge marocain ont pu asseoir les bases d’une défense effective de la marque ?
Pour traiter ce sujet, nous allons mettre en avant les actions consacrées dans le droit marocain en termes de défense de la marque, qu’il s’agisse des actions dont la nature est administrative (I) et celles judicaires (II).
I- Les actions administratives
Les deux principaux procédés administratifs de défense de la marque en droit marocain consistent en l’opposition (A) et les mesures aux frontières (B) qui se déroulent respectivement devant l’Office marocain de la propriété industrielle et commerciale (OMPIC) et l’Administration des douanes et des impôts indirects.
A- L’action en opposition
L’opposition qui permet aux titulaires de droits antérieurs de s’opposer à l’enregistrement d’une marque, a été consacrée par le droit marocain qui en a fixé la procédure ainsi que le délai et les conditions de son dépôt auprès de l’OMPIC.
Dans ce cadre, le législateur marocain qui réserve la procédure d’opposition au propriétaire d’une marque protégée ou déposée antérieurement, au propriétaire d’une marque antérieure notoirement connue au sens de l’article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, ainsi qu’au bénéficiaire d’une licence d’exploitation, limite le délai imparti à ces derniers pour présenter la demande d’opposition à deux mois courant à compter de la publication de la demande d’enregistrement d’une marque[6].
Mais cette opposition ne peut être admise que si elle concerne une marque protégée ou déposée antérieurement à la demande ou s’il s’agit d’une marque antérieure notoirement connue au sens de l’art. 6 bis de la Convention de Paris[7] pour la protection de la propriété industrielle[8].
Par ailleurs, l’opposition est faite auprès de l’Office marocain de la propriété industrielle et commerciale (OMPIC)[9] qui statue sur elle par une décision motivée dans un délai de six mois suivant l’expiration du délai de deux mois[10] prévu initialement pour le dépôt de l’opposition[11]. Le délai des six mois requis pour statuer sur l’opposition peut être étendu pour une nouvelle période de six mois sur décision motivée de l’OMPIC, « notifiée aux parties concernées ; sur demande conjointe présentée par les parties ; ou sur requête motivée de l’une des parties, acceptée par ledit organisme »[12]. Cette extension a été prévue par le législateur pour permettre aux parties d’aboutir à un règlement à l’amiable de leur différend.
Cependant, le délai initial des six mois prescrit pour rendre une décision sur une demande d’opposition peut être suspendu « lorsque ladite opposition est fondée sur une demande d’enregistrement de marque ; ou en cas d’engagement d’une action en nullité, en déchéance ou en revendication de propriété ; ou s’il y a une demande conjointe qui a été présentée par les parties à l’OMPIC sans que la durée de la suspension puisse excéder six mois courant à compter de la date de dépôt de ladite demande »[13].
En outre, la procédure d’opposition n’est clôturée que « lorsque l’opposant a perdu la qualité pour agir ; ou lorsque l’opposition est devenue sans objet par suite d’un commun accord du titulaire de la demande de protection et de l’opposant ; ou bien lorsque la demande de protection qui a fait l’objet d’opposition est retirée »[14].
In fine, l’opposition demeure dans le contexte marocain le moyen le plus employé pour défendre la marque de fabrique, de commerce ou de service. C’est pourquoi les demandes d’opposition des marques ont connu une nette évolution entre 2014 et 2018, passant de 898 à 1400 demandes[15]. En 2018, sur les 1400 demandes introduites, l’OMPIC a rendu « 1280 décisions dont 64% justifient les oppositions, 34% rejettent les oppositions tandis que 2% des décisions concernent des oppositions partiellement justifiées (enregistrement de marques pour certains produits ou services désignés, objet de l’opposition) »[16].
B- Les mesures aux frontières
Outre l’opposition, la législation marocaine a consacré un autre moyen administratif de défense de la marque, à savoir les mesures aux frontières dont la mise en application incombe à l’administration des douanes et impôts indirects. Ces mesures consistent principalement en la suspension de la mise en libre circulation des marchandises soupçonnées être des marchandises de contrefaçon.
En effet, la loi n°31-05 du 14 février 2006 modifiant et complétant la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle, permet au propriétaire d’une marque enregistrée ou au bénéficiaire d’un droit exclusif d’exploitation, d’adresser une demande à l’administration des douanes et impôts indirects lui demandant de « suspendre la mise en libre circulation des marchandises soupçonnées être des marchandises de contrefaçon portant des marques identiques ou des marques similaires à ladite marque qui prêtent à confusion »[17].
La demande de mesures aux frontières « doit être étayée d’éléments de preuve adéquats présumant qu’il existe une atteinte aux droits protégés et fournir des informations suffisantes »[18] pour permettre à l’administration des douanes et impôts indirects de reconnaître raisonnablement les marchandises soupçonnées d’être contrefaites.
Une fois que la mesure de suspension ait été décidée par l’administration des douanes et impôts indirects et qu’elle ait été notifiée au demandeur et au déclarant ou au détenteur des marchandises, elle demeure valable « pour une période d’un an ou pour la période de protection de la marque restant à courir lorsque celle-ci est inférieure à un an »[19].
Au surplus, l’Administration des douanes et impôts indirects peut, de son propre chef lorsqu’elle détermine ou soupçonne que des marchandises importées, exportées ou en transit sont contrefaites, procéder à la suspension d’office de la mise en circulation de ces marchandises, tout en informant, sans délai, le détenteur des droits de la mesure prise.
II- Les actions judiciaires
Si l’opposition et les mesures aux frontières sont deux procédés auxquels les détenteurs de droits recourent auprès des administrations concernées en vue de défendre leurs marques, d’autres actions de nature judiciaire ont été prévues par le législateur marocain. Ces actions en justice peuvent être de nature soit civile soit pénale, mais il n’en demeure que « l’action pénale ne peut être exercée qu’après que la juridiction civile, saisie de l’action en contrefaçon, a rendu un jugement passé en force de chose jugée »[20].
Du reste, ces actions judiciaires se déclinent principalement autour des actions en nullité, en déchéance et en revendication de la propriété (A), et de l’action en contrefaçon (B).
A- Les actions en nullité, en déchéance et en revendication de propriété
Les actions en nullité, en déchéance et en revendication de la propriété sont toutes des procédures qui sont accomplies devant la justice. Mais à la différence de l’action en revendication de la propriété qui ne peut être entreprise que par une personne estimant avoir un droit sur la marque, les deux autres actions sont à la portée de toute personne intéressée, si bien que l’action en nullité peut se faire aussi par le titulaire d’un droit antérieur ou le titulaire d’une marque notoirement connue au sens de l’article 6 bis de la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle.
Or, l’action en nullité qui permet à toute partie intéressée, y compris le ministère public, de demander la nullité de l’enregistrement d’une marque opéré en violation des dispositions des articles 133 à 135 de la loi n°23-13 du 21 novembre 2014 modifiant et complétant la loi 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle[21], n’est recevable, pour ce qui concerne le titulaire d’un droit antérieur, que « si la marque a été déposée de bonne foi et s’il en a toléré l’usage pendant cinq ans »[22]. Toutefois, la décision d’annulation se prévaut dans ce cadre d’un effet absolu.
En ce qui concerne le titulaire d’une marque notoirement connue au sens de l’article 6 bis de la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, il peut réclamer l’annulation de l’enregistrement d’une marque susceptible de créer une confusion avec la sienne, mais son action en nullité se prescrit par cinq ans à compter de la date d’enregistrement de la marque à moins que ce dernier n’ait été demandé de mauvaise foi[23].
S’agissant de l’action en déchéance qui peut être demandée en justice par toute personne intéressée, elle encourt « la déchéance des droits du propriétaire d’une marque qui, sans justes motifs, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits ou services couverts par l’enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans »[24]. Cette procédure encourt également la déchéance des droits du propriétaire d’ « une marque devenue de son fait soit la désignation usuelle dans le commerce du produit ou du service; soit une marque propre à induire le public en erreur, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique, du produit ou du service »[25].
Par ailleurs, une personne qui estime avoir droit sur une marque peut entreprendre une action en revendication de sa propriété en justice, et ce au cas où « un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d’un tiers, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle »[26]. Cette action en revendication de la propriété a un délai de prescription de trois ans à compter de la date de l’enregistrement de la marque au registre national des marques, à moins que le déposant ne soit de mauvaise foi[27].
B- L’action en contrefaçon
La contrefaçon qui est définie par l’art. 201 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05 comme « toute atteinte portée aux droits du propriétaire (…) d’une marque de fabrique, de commerce ou de service enregistrée, (…)», se matérialise, dans le cas de la marque de fabrique, de commerce et de service, par « une reproduction, totale ou partielle, une imitation frauduleuse de la chose sur laquelle porte le droit de propriété, l’utilisation d’une marque contrefaite, la détention de produits ou services portant une marque contrefaite, ou par une vente, offre de vente ou importation de produits ou services portant une marque contrefaite »[28]. En termes de coûts, la contrefaçon entraîne annuellement au Maroc « une perte entre 6 et 12 milliards de dirhams (0,7% à 1,3% du PIB), ainsi qu’une perte fiscale de 1 milliard de dirhams et 30 000 emplois perdus ou informels »[29].
Face aux méfaits de la contrefaçon et en vue de défendre les intérêts des propriétaires de marques enregistrées, le législateur marocain leur a conféré le droit d’exercer une action en contrefaçon devant le tribunal compétent lorsqu’il y a une quelconque atteinte à leurs droits sur la marque.
Au Maroc, l’action en contrefaçon est soit soumise à la compétence du « tribunal de commerce du lieu du domicile réel ou élu du défendeur ou le tribunal de commerce de Casablanca si le défendeur est domicilié à l’étranger »[30] quand elle est de nature civile, soit « portée par la victime ou le parquet devant le tribunal correctionnel du lieu du fait dommageable »[31] lorsqu’elle est de nature pénale.
De plus, les actions en contrefaçon dont le délai de prescription est de trois ans à compter de la date de survenance des faits qui en sont la cause[32], débouchent sur des sanctions tant civiles et pénales, prévues par la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
C’est ainsi que le législateur marocain a énoncé diverses sanctions civiles[33] qui peuvent s’appliquer cumulativement selon les cas et qui tournent autour de l’interdiction de la poursuite des actes argués de contrefaçon; la saisie des produits contrefaits ou des matériaux servant à leur fabrication[34] ; la destruction d’objets reconnus contrefaits et des dispositifs ou moyens spécialement destinés à la réalisation de la contrefaçon ; les dommages-intérêts. Sur ce dernier point, le législateur offre à la victime de la contrefaçon le choix entre les dommages-intérêts effectivement subis plus tout bénéfice attribuable à l’activité interdite qui n’a pas été pris en compte dans le calcul de ces dommages et les dommages-intérêts dont le montant est au moins 50.000 dirhams et au plus 500.000 dirhams, selon ce que le tribunal estime équitable pour la réparation du préjudice subi[35]. La prise en compte par le législateur des bénéfices générés par l’activité interdite dans le calcul des dommages-intérêts effectivement subis a pour objectif de priver le contrefacteur des « conséquences profitables de son comportement en lui ôtant tous les gains et économies qu’il a pu réaliser consécutivement à la commission de l’acte de contrefaçon »[36].
Outre les sanctions civiles, la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle a prévu dans son art. 225 des sanctions pénales consistant en une peine d’emprisonnement de trois mois à un an et une amende de 100.000 à 1.000.000 dirhams ou de l’une de ces deux peines seulement, dont sont passibles tant les contrefacteurs d’une marque enregistrée et les personnes qui ont frauduleusement apposé une marque appartenant à autrui, que ceux qui ont fait usage d’une marque sans l’autorisation de l’intéressé ; ceux qui ont importé ou exporté des produits revêtus d’une marque contrefaite ou frauduleusement apposée ; ceux qui ont sciemment livré un produit ou fourni un service autre que celui qui leur a été demandé sous une marque enregistrée ; et ceux qui ont détenu sans motif légitime des produits qu’ils savaient revêtus d’une marque contrefaite ou frauduleusement apposée.
De même, le législateur marocain a prévu des peines communes aux actions civiles et pénales en contrefaçon, notamment la privation pour une période de cinq ans au maximum, du droit de faire partie des Chambres professionnelles[37] ; et la publication des décisions judiciaires devenues définitives[38]. S’agissant de cette dernière mesure, le juge marocain a montré son utilité dans un arrêt du 06 décembre 2005 de la Cour d’appel de commerce de Marrakech, où il a affirmé qu’ « attendu que la jurisprudence procède constamment à la publication des jugements en matière de contrefaçon et d’imitation, l’efficacité de cette mesure réside dans sa fonction répressive puisqu’elle a pour rôle principal de faire connaître les contrefacteurs et les imitateurs, et d’informer le public sur l’existence des produits contrefaits, et par conséquent la vigilance nécessaire sera prise à l’égard de la nature et l’origine des produits lancés sur le marché »[39].
Pour conclure à l’existence d’un acte de contrefaçon, le juge marocain a cherché avant tout à soulever les points de ressemblance entre les signes distinctifs de la marque d’origine et de la marque présumée contrefaite. Ainsi à l’occasion d’un litige sur l’usage d’une marque de fabrique, la Cour d’appel de commerce de Casablanca a jugé, dans un arrêt du 10 juin 2008, que « la similitude entre deux marques de commerce au niveau de l’écriture et de la prononciation est de nature à créer une confusion dans l’esprit du consommateur et à le tromper, et que de ce fait il y a lieu de radier le mot qui constitue une imitation de la marque d’origine »[40].
C’est en étudiant aussi les points de ressemblances entre le produit d’origine et le produit supposé contrefait, que la Cour d’appel de commerce de Marrakech a reconnu, dans un arrêt du 28 janvier 2010[41], l’existence d’une contrefaçon par imitation. En l’espèce, « le propriétaire de la marque “CIGARE” avait engagé une action en contrefaçon contre une société qui avait déposé la marque “FLORAL PAR NEW CIGARE” et demandé la radiation de cette marque »[42]. Dans son appréciation des faits, le juge marocain a considéré que bien qu’il n’y a eu que des différences mineures entre les deux marques, cela n’empêche que la marque « FLORAL PAR NEW CIGARE » présente un élément flagrant d’imitation écrit en des termes clairs, à savoir celui de « CIGARE », ce qui prouve la survenance d’une contrefaçon par imitation.
Conclusion
Au Maroc, la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05, a élargi les voies de recours possibles dont disposent les titulaires de marques, en leur permettant non seulement de formuler une opposition ou de demander l’application de mesures aux frontières, mais aussi d’exercer des actions auprès de la justice, notamment des actions en nullité, en déchéance et en revendication de la propriété, ainsi qu’une action en contrefaçon.
Mais eu égard aux délais rallongés et aux coûts onéreux des actions entreprises devant la justice, il serait nécessaire de mieux renforcer l’efficacité des moyens administratifs de défense de la marque et d’en promouvoir l’utilité auprès des opérateurs économiques.
Dans ce cadre, l’étude des différentes actions en défense de la marque telles que consacrées par le droit marocain, démontre à quel point ces procédures sont complexées et font que les recours administratifs introduits par les parties lésées sont généralement limités, à l’exception de l’opposition qui constitue le procédé le plus déployé en termes de défense de la marque. Cela n’empêche que les actions prévues par la législation marocaine sont judicieuses, surtout si elles sont accompagnées par une simplification des démarches administratives.
Bibliographie
- Doctrine
– Azddou Nadia, « Le droit marocain des marques », Revue Marocaine de Droit, d’Economie et de Gestion, Hors-série n°57, octobre 2018.
– Kettani Mehdi, « La contrefaçon : aspects juridiques et pratiques judiciaires », Dlapaper [Document électronique], 2017.
– Kettani Mehdi, « La contrefaçon : entre les textes de la loi et la jurisprudence», Dlapaper [Document électronique], août 2017.
– Sabik Naim, Le rôle de la propriété industrielle dans la protection du consommateur, Thèse de Doctorat en Droit privé, présentée et soutenue publiquement le 10 mai 2010 sous la direction de Franck Marmoz.
- Rapports et documents officiels
– Italian Ministry of Economic Development, Directorate-General for the Fight against Counterfeiting, Protection of Intellectual Property Rights in the Euro-Mediterranean Area: Focus on the Agro-Food Sector, Report, 2017.
– Office marocain de la propriété industrielle et commerciale (OMPIC), Guide sur les marques de fabrique, de commerce ou de service, 2007.
– Office marocain de la propriété industrielle et commerciale (OMPIC), Rapport d’activité, 2018.
- Législation
– Loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle promulguée par dahir n° 1-00-19 du 9 kaada 1420 (15 février. 2000), telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 (du 21 novembre 2014) et 31-05 (du 20 février 2006).
- Traités et accords internationaux
– Accord de libre-échange Maroc-Tunisie de 1996.
– Accord de libre-échange Maroc-Jordanie de 1998.
– Accord d’Agadir créant une zone de libre-échange euro-méditerranéenne de 2001.
– Accord de 2001 créant une zone de libre-échange entre le Maroc et les Émirats arabes unis.
– Accord de libre-échange Maroc-États-Unis d’Amérique de 2004.
– Accord de libre-échange Maroc-Turquie de 2004.
– Arrangement de Madrid concernant l’enregistrement international des marques de 1891.
– Arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques de 1957.
– Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle de 1883.
– Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique de 2011.
– Traité sur le droit des marques de 1994.
- Jurisprudence
– Cour d’appel de commerce de Marrakech, arrêt n° 1052 du 06/12/2005, dans dossier n° 605.10.05.
– Cour d’appel de commerce de Casablanca, arrêt n° 2999/2008 du 10 juin 2008.
– Cour d’appel de commerce de Marrakech, arrêt n°116 du 28 janvier 2010 dans Dossier n°288/2008, Propriétaire de la marque « CIGARE » c/ Société « FLORAL PAR NEW CIGARE».
- Webographie
– https://www.dlapiper.com/fr/morocco/insights/publications/2017/08/la-contrefacon-entre-les-textes-de-loi/
– http://www.ompic.org.ma/fr/content/publications-ompic
– https://www.tresor.economie.gouv.fr/Pays/MA/propriete-intellectuelle- https://ambsofia.esteri.it/ambasciata_sofia/resource/doc/2017/06/report_unicri_-eng.pdf
[1] Art. 133 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle promulguée par dahir n° 1-00-19 du 9 kaada 1420 (15 février. 2000), telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 (du 21 novembre 2014) et 31-05 (du 20 février 2006).
[2] Tel que révisé à Bruxelles en 1900, à Washington en 1911, à La Haye en 1925, à Londres en 1934, à Nice en 1957 et à Stockholm en 1967, et modifié en 1979.
[3] Modifié en 2006 et en 2007.
[4] Le Maroc a adhéré respectivement le 27 février 1917 à la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle de 1883, le 30 juillet 1917 à l’Arrangement de Madrid concernant l’enregistrement international des marques de 1891, le 8 octobre 1999 au Protocole afférent à cet accord, le 25 juillet 1966 à l’Arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques de 1957, tout en ayant ratifié le 6 avril 2009 le Traité sur le droit des marques de 1994.
[5] Naim Sabik, Le rôle de la propriété industrielle dans la protection du consommateur, Thèse de Doctorat en Droit privé, présentée et soutenue publiquement le 10 mai 2010 sous la direction de Franck Marmoz, Université Jean Moulin Lyon 3, p. 16.
[6] Art. 148.2 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[7] Au sens de l’art. 6 bis de la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, la notion de marque antérieure notoirement connue renvoie à « une marque que l’autorité compétente du pays de l’enregistrement ou de l’usage estimera y être notoirement connue comme étant déjà la marque d’une personne admise à bénéficier de la présente Convention et utilisée pour des produits identiques ou similaires ».
[8] Art. 148.2 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[9] Ibid.
[10] Art. 148.3 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[11] Le délai initial de deux mois est celui durant lequel le propriétaire de la marque antérieurement protégée ou déposée ou de la marque antérieure notoirement connue, entreprend une opposition à la demande d’enregistrement d’une marque. Ce délai de deux mois court à compter de la publication de la demande d’enregistrement de la marque- objet de l’opposition-.
[12] Art. 148.3 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[13] Ibid.
[14] Art. 182.2 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[15] Office marocain de la propriété industrielle et commerciale (OMPIC), Rapport d’activité, 2018, p. 24. Disponible en ligne sur < http://www.ompic.org.ma/fr/content/publications-ompic>. Consulté la dernière fois le 20 avril 2020.
[16] Ibid.
[17] Art. 176.1 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[18] Ibid.
[19] Ibid.
[20] Mehdi Kettani, « La contrefaçon : aspects juridiques et pratiques judiciaires », publié en 2017 sur <https://www.dlapiper.com>. Consulté la dernière fois le 27 avril 2020.
[21] Les articles 133 à 135 définissent la marque et distinguent les signes distinctifs d’une marque ainsi que les signes dépourvus de caractère distinctif, tout en établissant les signes qui ne peuvent être adoptés comme marques ou éléments de marque.
[22] Art. 161 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[23] Art. 162 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[24] Art. 163 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[25] Art. 164 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[26] Art. 142 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[27] Ibid.
[28] Mehdi Kettani, « La contrefaçon : aspects juridiques et pratiques judiciaires », op. cit.
[29] Voir <https://www.tresor.economie.gouv.fr/Pays/MA/propriete-intellectuelle>. Consulté la dernière fois le 2 mai 2020.
[30] Art. 204 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[31] Mehdi Kettani, « La contrefaçon : entre les textes de la loi et la jurisprudence », publié le 3 août 2017 sur <https://www.dlapiper.com/fr/morocco/insights/publications/2017/08/la-contrefacon-entre-les-textes-de-loi/>. Consulté la dernière fois le 10 mai 2020.
[32] Art. 206 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[33] Articles 203, 222 et 224 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[34] Les saisies au Maroc sont plus ou moins considérables comme l’a rapporté en 2014 le Comité National pour la Propriété Industrielle et Anti-Contrefaçon (CONPIAC) qui Le nombre à près de 7,349, 000 de produits contrefaits saisis avec une valeur marchande s’élevant à 105,600,000 dirhams (soit 9,700,000 euro). Voir : Italian Ministry of Economic Development, Directorate-General for the Fight against Counterfeiting, Protection of Intellectual Property Rights in the Euro-Mediterranean Area: Focus on the Agro-Food Sector, Report, 2017, p. 158. Disponible en ligne sur <https://ambsofia.esteri.it/ambasciata_sofia/resource/doc/2017/06/report_unicri_-eng.pdf>. Consulté la dernière fois le 20 mai 2020.
[35] Art. 224 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[36] Nadia Azddou, « Le droit marocain des marques », Revue Marocaine de Droit, d’Economie et de Gestion, Hors-série n°57, octobre 2018, p. 17.
[37] Art. 208 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[38] Art. 209 de la loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle telle que modifiée et complétée par les lois n°23-13 et 31-05.
[39] Cour d’appel de commerce de Marrakech, arrêt n° 1052 du 06/12/2005, dans dossier n° 605.10.05. Cité in : OMPIC, Guide sur les marques de fabrique, de commerce ou de service, 2007, p. 110.
[40] Cour d’appel de commerce de Casablanca, arrêt n° 2999/2008 du 10 juin 2008.
[41] Cour d’appel de commerce de Marrakech, arrêt n°116 du 28 janvier 2010 dans Dossier n°288/2008, Propriétaire de la marque « CIGARE » c/ Société «FLORAL PAR NEW CIGARE ». Cité in : Mehdi Kettani, « La contrefaçon : aspects juridiques et pratiques judiciaires », op. cit.
[42] Mehdi Kettani, ibid.