Enseigner le français en classe Avec des Manuels d’étude ou Sans ? Un outil d’apprentissage ou un carcan.
مقال م.د.إيناس سالم ابراهيم/الجامعة المستنصرية،العراق، نشر بالعددين 17 و18 من مجلة جيل العلوم الإنسانية والاجتماعية الخاصين بصعوبات التعلم ص 313، مارس 2016.
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Résumé :
Le manuel est l’outil inévitablement nécessaire pour apprendre une langue raison pour laquelle son choix doit obéir à des critères très strictes et très précis qui prennent en considération le niveau des apprenants, leurs prérequis, leur culture, leurs objectifs de l’apprentissage : un manuel qui peut être bon pour les uns peut ne pas l’être pour les autres. Tout dépend de “Qui apprend ? Quoi ? Et Pourquoi ? Une fois il choisit son manuel, quel rapport doit l’enseignant établir avec lui ? Deux possibilités s’ouvrent là-dessus: soit il se laisse guider par le manuel soit il guide lui-même le manuel de sorte qu’il se permet, là où il trouve nécessaire, de déchainer des contraintes que lui impose ce dernier. Ainsi faisant, l’enseignant évite la monotonie qui peut atteindre les apprenants ainsi que l’enseignant lui-même – résultant de l’utilisation fréquente et systématique du même manuel. Il reste à préciser quels rapports les apprenants peuvent tenir avec le manuel. Le premier pas consiste à les faire sentir que ce manuel est le leur, que ce n’est pas un livre comme n’importe quel autre et qu’il est leur premier connecteur avec la langue qu’ils veulent apprendre tout en sachant qu’il n’est leur unique référence à ce propos.
INTRODUCTION :
Apprendre à communiquer en langue étrangère, c’est dans un premier temps communiquer dans la classe. Bien entendu, certaines personnes ont besoin de parler français dans leur travail, mais la plupart des apprenants utilisent leurs connaissances de la langue lors de voyages à l’étranger où ils sont tout simplement très contents du fait de connaître une langue étrangère supplémentaire. Cependant, pour enseigner le français en classe, l’enseignant se trouve obligé d’aider les apprenants à se plonger complètement dans l’atmosphère de la langue française et à leur faire oublier leur langue maternelle surtout quand il s’agit d’un travail collectif dans une classe de langue.Ainsi, pourapprendre une langue, le manuel d’apprentissage – le livre de l’élève – est un outil nécessaire. Le choix du manuel doit obéir à des critères très strictes et très précis selon le niveau des apprenants, leurs prérequis, leur culture, leurs objectifs de l’apprentissage.Une fois l’enseignant choisit son manuel, il est nécessaire de savoir quel rapport devrait-il établir avec lui ? Soit il se laisse guider par le manuel soit il guide lui-même le manuel de sorte qu’il se permet, là où il trouve nécessaire, de déchaîner des contraintes que lui impose ce dernier. Ainsi faisant, l’enseignant évite la monotonie qui peut atteindre les apprenants, et dépasse la routine résultant de l’utilisation fréquente et systématique du même manuel. L’utilisation des supports audio et vidéo, en classe, estessentielle, pour les apprenants,afin de développer leurs qualités d’écoute, et leur donner la possibilité de découvrir une autre source de l’apprentissage.
La question qui se pose est de savoir quels rapports devraient tenir les apprenants avec le manuel. Le premier pas consiste à familiariser les apprenants avec leur manuel, et leurexpliquer que ce n’est pas un livre comme n’importe quel autre et qu’il est leur premier connecteur avec la langue qu’ils veulent apprendre. L’enseignant s’efforce de faire en sorte que le manuel soit un livre comme un autre, que l’on peut lire le soir avec plaisir. L’enseignant, lui-même, devrait consacrer en début d’année une leçon à la découverte du manuel :à quoi ça sert ?Comment fonctionnent les renvois de pages ?Comment repérer la leçon, les documents, les exercices, et les consignes ?Comment apprendre à lire la table des matières ? Comment chercher des notions ou des illustrations ?Comment se servir de l’index ?
Cette étude aborde le thème de l’utilisation du manuel et les stratégies de l’enseignant, en classe de français langue étrangère (FLE). Il s’effectue sur la base d’une observation de troiscours, d’une enseignante native, destinés à des apprenants étrangers, multi nationalités, souhaitant apprendre le français. L’une des trois séances a eu lieu dans un Atelier de renforcement linguistique et les deux autres séancesétaient des cours d’Expression Orale/ Compréhension Orale.
Au départ, nous allons présenter le contexte, le déroulement des cours observés, puis nous allons analyser comment le manuel d’étude est présent dans une classe de langue en nous appuyant sur des exemples transcrits des cours en question. Ensuite, nous allons pousser plus loin l’analyse pour souligner l’organisation des séances et la manière d’après laquelle l’enseignante a exploité le manuel. Enfin, les remarques de la discussion que nous avons faites avec l’enseignante, et l’analyse de certaines techniques de classe nous ontconduites à des réflexions personnelles sur la stratégie de l’utilisation du manuel en classe de FLE.
Contexte : Observation de trois cours de FLE, au centre Universitaire pour l’Enseignement du Français aux Étudiants Étrangers (C.U.E.F.E.E.). Ce centre, accueille des étudiants étrangers souhaitant apprendre le français ou parfaire leurs connaissances de cette langue. La plupart d’entre eux ont l’intention de s’inscrire à l’Université, à Tours ou dans une autre ville en France ; d’autres suivent cet enseignement dans un but professionnel.
Il s’agit d’une observation de trois cours de FLE, comme suit :
- Un cours d’Expression et Compréhension Orale dans la salle Amboise, le lundi 20 novembre 2015, (de 11h30 à 13h30). Dans ce cours, l’enseignante n’exploite pas de manuel d’apprentissage Taxi2.
- Un cours d’Expression et Compréhension Orale dans la salle Amboise, le lundi 19 octobre 2015, (de 11h30 à 13h30). Dans ce cours, l’enseignante exploite, strictement, le manuel d’apprentissage intitulé
- Un Atelier de renforcement linguistique, dans la salle Langeais, le jeudi 01 octobre 2015, (de 13h00 à 14h30). Dans ce cours, l’enseignante exploite des extraits d’autres manuels d’apprentissage, comme Alter Ego2.Elle éprouve une certaine liberté vis-à-vis de manuel.
Ces trois cours s’appuient chacun sur un manuel ou sur une méthode d’apprentissage intitulée : Alter Ego2 et Taxi 2.
Lieu :Dans une classe, travail individuel et collectif.
Public : Apprenants multi nationalités âgés approximativement de (21 ans)
Niveau : Intermédiaire (1)
- (23) apprenants, dans un cours d’Expression et Compréhension Orale.
- (6) apprenants, dans un Atelier de renforcement linguistique.
Objectif : objectif culturel, linguistique et grammatical.
La disposition des salles : c’étaient deux salles de taille moyenne équipées d’un téléviseur, d’un magnétophone, d’un lecteur DVD, d’un magnétoscope, et d’un tableau.La disposition des tables dans les deux séances est en “U”. Cette disposition donne l’occasion à l’enseignante de se déplacer facilement dans la salle, et permet aux étudiants de se voir entre eux et facilite les interactions.
Nous tenons à souligner que la disposition des tables dans la salle Langeais était en “U” de telle façon que les apprenants entourent l’enseignante qui est le point central de la classe. Cette disposition était idéale par rapport au nombre diminué des apprenants : (6 sur 13), car elle donnait l’occasion à l’enseignantede demander à la classe de se repartir en groupes de deux.
En ce qui concerne la salle Amboise, la disposition était à peu près classique. Vu que le nombre des apprenants était 23, ce qui était grande pour une salle aussi petite qu’Amboise : les apprenants se mettaient en lignes, au milieu d’un “U” ce qui empêchait parfois l’enseignante de se déplacer facilement.
Nous tenons à trouver la différence qui réside derrière les différentes manières d’exploitation d’un manuel d’apprentissage, en classe ?
Enseigner avec ou sans manuel :
Avant d’analyser le mode d’introduction et l’utilisation du manuel dans ces cours, et avant de présenter le thème, le déroulement et la progression de ces trois séances en question, nous allons présenter la structure de chaque manuel adopté dans les trois cours observés.
La structure du manuel :
Le cours d’Expression et Compréhension Orale s’appuie sur le manuel Taxi2.[1] Le manuel dont il s’agit s’adresse, comme il est précisé dans son avant-propos, à un public de grands adolescents et adultes ayant suivi 80 à 100 heures d’apprentissage du français, il suit les recommandations de niveau A2 du (CECR). Taxi 2 se compose de (9) unités comprenant quatre leçons chacune ; trois leçons d’apprentissage et une leçon construite autour d’un aspect de la culture française développée dans l’unité. Il s’inscrit dans les manuels adoptant pour approche : l’approche communicative.
Le manuel dont l’enseignante s’est servie, dans un Atelier de renforcement linguistique est Alter Ego2.[2]Ce manuel se compose de neuf dossiers de trois leçons. Chaque dossier se termine sur un carnet de voyage, parcours à dominante culturelle et interactive. Chaque leçon est composée de double page qui présente un parcours qui va d’activités de compréhension à des activités d’expression et inclut des exercices de réemploi. La transcription des enregistrements, un précis grammatical, des tableaux de conjugaison et un lexique multilingues se trouvent à la fin du manuel. Des pages concernent des points langue et des aide-mémoire permettent la conceptualisation et l’assimilation des contenus communicatifs et linguistiques. Des CD complètent le manuel. Cette méthode s’adresse à des débutants et vise l’acquisition des compétences décrites dans les niveaux A2 et B1 (en partie) du CECR, dans un parcours de 120 heures d’activités d’enseignement/apprentissage complété par des tâches d’évaluation.
Nous avons observé trois cours : deux cours d’Expression et Compréhension Orale s’appuient sur le manuel Taxi2, etun Ateliers de renforcement linguistique où l’enseignante exploite des extraits des manuels soit Alter Ego2, Rondpoint[3],soit le NSF3.[4] Parfois, l’enseignante cherche des activités dans d’autres ouvrages, pour faire apprendre et pratiquer aux élèves des techniques spécifiques d’expression, comme par exemple l’ouvrage d’ALAIN TROUVE, Pratiques D’expression, 250 activités pour dire et pour écrire.[5]
Ainsi, nous allons aborder le premier cours observé -un cours d’Expression et Compréhension Orale où il était prévu que l’enseignante utilise le manuel Taxi 2, maiselle n’exploite pas de manuel. Ce cours est intéressant parce qu’il s’agit d’enseigner sans manuel. Ensuite, nous allons voir comment les deux enseignantes exploitent le manuel dans les autrescours observés : un cours d’Expression et Compréhension Orale, et un cours de renforcement linguistique.
Enseigner sans Manuel :
La séquence de classe observée est un cours d’Expression et Compréhension Orale, d’une enseignantenative destiné à un groupe des étudiants multi nationalités.D’après le plan suivi par elle, dès le début de l’année, 3 leçons de chaque unité sont suffisantes, la quatrième leçon, construite autour d’un aspect de la culture française et développée dans l’unité, va offrir aux apprenants une bonne occasion pour connaître un aspect de la culture de la langue qu’ils apprennent. Dans ce cas-là, l’enseignante référant aborde la thématique de l’unité y compris les objectifs communicatifs, linguistiques, et la phonétique, dans les cours d’expression et compréhension orales, d’expression et compréhension écrites et dans un cours de grammaire, alors qu’une autre enseignante travaille sur des extraits d’autres manuels dans un cours de renforcement linguistique.
En ce qui concerne les apprenants,nous avons remarqué que chacun d’entre eux dispose du manuel, à la fois, pour poursuivre l’unité sur place avec l’enseignante, et pour travailler de façon autonome à la maison. Ils l’utilisent, ainsi que l’enseignante, à la fois, en tant qu’outil, dans les cours d’expression et compréhension orales, d’expression et compréhension écrites et dans un cours de grammaire, et en tant que support, dans un cours de renforcement linguistique.
D’habitude, l’enseignante aurait dû faire une unité par semaine, mais dans ce cours, il arrive qu’elle soit « amenée à ne pas suivre la progression suivie à cause de degré de difficulté des leçons suivantes et la venue de nouveaux apprenants » dit-l’enseignante. Normalement, ce cours s’appuie sur le manuel Taxi 2,niveau intermédiaire (1), mais cette fois-ci, l’enseignante n’a pas travaillé sur ce manuel ; elle a distribué aux apprenants des photocopies des extraits du magazine.
Description de la séance :
Il s’agit d’un cours d’Expression et Orale qui a eu lieu au C.U.E.F.E.E., de durée d’une heure et demie. Le groupe est de niveau intermédiaire (1). L’enseignante n’exploite pas de manuel.
Le texte que l’enseignante a choisi, pour travailler le subjonctif (exprimer l’opinion et le souhait),est une bande dessinée – extrait du magazine : (Mieux vivre sa vie, avril 2005). Nous allons présenter déroulement de cours en question et analyser les stratégies et le rôle de l’enseignante qui a choisi un extrait du magazine au lieu d’exploiter un manuel d’apprentissage.
Déroulement de la séance :
Lors de la séquence de classe observée, il s’agit de réviser un point de grammaire : exprimer l’opinion et le souhait en utilisant le Subjonctif. Au début du cours, l’enseignante fait un rappel de la règle qui a déjà été vue dans les cours précédents, à partir d’exemples qu’elle crée elle-même. Ellemet en place une activité durant laquelle les apprenants doivent inventer – seul ou par groupe de deux – une ou deux questions en employant le subjonctif. Ensuite,on passe à la correction.
L’enseignante a distribuédes photocopies– la bande dessinée (BD),et met en place une activité écrite et orale, durant laquelle les apprenants doivent résumer et écrire une lettre, et inventer à la fois, par groupe de pair, une conversation en employant le subjonctif.
- Observer cette planche humoristique.
- Résumez en 3 phrases la scène représentée dans cette bande dessinée.
- La mère écrit une lettre à son fils dans laquelle elle lui fait des reproches concernant son comportement, puis lui demande de faire certains efforts.
→ Utilisez : souhaiter – refuser – tenir à ce que – ne plus supporter – en savoir assez que
- Ramasser le devoir, le corriger, et le rendre corrigé aux apprenants.
Enseigner avec Manuel :
Nous avons observé deux séances, la première est d’une durée de deux heures et la deuxième est d’une durée d’une heure et demie.
C’était, en l’occurrence, un cours d’Expression et Compréhension Orale dans la salle Amboise, le lundi 19 octobre 2015, (de 11h30 à 13h30), et Un Atelier de renforcement linguistique, dans la salle Langeais, le jeudi 01 octobre 2015, (de 13h00 à 14h30).
Dans la première séance, l’enseignante exploite le manuel d’apprentissage -proposé au C.U.E.F.E.E., intitulé Taxi2. Dans la seconde, l’enseignante exploite des extraits d’autres manuels d’apprentissage, comme Alter Ego2.
Description de la première séance :
Ce cours a duré deux heures successives, l’enseignante n’a pas proposé une pause à ses apprenants. Le texte choisi est une enquête qui appartient à l’unité (7) du manuel :Taxi 2. L’enseignante était plus stricte par rapport aux consignes données dans le livre pédagogique.
Déroulement de la séance :
- Distribuer des photocopies de double page qui correspond à la leçon en question, dans le manuel, pour travailler sur une enquête : Taxi 2, « les valeurs importantes dans la vie », unité (7).
- Faire observer les photos du rétroviseur en demandant aux apprenants d’associer chaque personnalité listée de 1 à 5 au domaine qui lui convient (de a à e).
- Le rôle de l’enseignante qui suit strictement les consignes du guide pédagogique, est de développer les idées en donnant des informations supplémentaires pour chaque personnalité.[6]
- Demander aux apprenants de lire les résultats de l’enquête présentés dans le rétroviseur.[7]
- Faire travailler les apprenants par groupe de deux et leur demander d’imaginer ensemble les réponses manquantes et de justifier les réponses (ProductionLibre).
- Faire écouter l’enregistrement. (écoute globale) et demander aux apprenants de compléter l’enquête. Là, les apprenants ne peuvent pas répondre, l’enseignante essaie de refaire l’écoute en découpage pour que les apprenants puissent répondre aux trois questions de l’activité.
- Faire l’exercice 2 dans le manuel qui a pour objectif de travailler sur le discours rapporté.
- Correction de l’exercice, au tableau.
- Passer à l’exercice 4 : demander aux apprenants de résumer l’interview de Zinedine Zidane en utilisant le discours rapporté.Et là, nous avons remarqué que l’enseignante a suivi,strictement, les consignes données dans le guide pédagogique et même elle était occupée pendant le cours de lire ce qui est noté dans ce guide, surtout lorsque les apprenants se mettentà répondre à l’exercice 4. Ensuite, elle a écrit au tableau la consigne suivante pour que les apprenants puissent transformer le discours :
→ Le Journaliste demande à Zinedine Zidane …
Description de la seconde séance :
Cette séance a eu lieu dans un Atelier de renforcement linguistique – Niveau intermédiaire(1). D’habitude, ce cours s’appuie sur des extraits de divers manuels.Alter Ego2, Rondpoint, NSF3 sont les manuels privilégiés pour l’enseignante.Parfois,elle cherche des activités dans d’autres ouvrages, pour faire apprendre sesapprenants des techniques spécifiques d’expression. À ce propos, elle préfère l’ouvrage d’ALAIN TROUVE, Pratiques D’expression, 250 activités pour dire et pour écrire.[8]La volonté de l’enseignante, les attentes des apprenants, son désir personnel de renouvellement, ainsi que des objectifs spécifiques peuvent justifier la recherche des textes ou des extraitsqui n’existent pas dans le livre dont elle-même et sa classe disposent. Ce cours de renforcement linguistique est d’une durée d’une heure et demie, au C.U.E.F.E.E. C’était un cours d’une enseignante native destiné à un groupe d’apprenants jeunes adultes de niveau intermédiaire (1), de nationalités variées : la majorité de la classe est chinoise, mais elle compte également deux russes, une allemande et une coréenne. Dans les cours de renforcement linguistique, l’enseignante tente, à la fois, d’encourager les apprenants à maîtriser le français, de les faire parler et de réviser.L’enseignante a choisi le manuel Alter Ego2, selon sa démarche pédagogique et selon des critères personnels. L’enseignante, dans ce cours de renforcement linguistique qui était censé s’inscrire dans une progression par rapport au précédent,varévisertout ce qui estétudié dans les autres cours, en choisissant des activités écrites et orales. Dans ce cours de renforcement linguistique, l’enseignante va réviser le passé composé et l’emploi des marqueurs chronologiques.
Déroulement de la séance :
Il s’agit d’un cours de durée d’une heure et demie, le texte que l’enseignante a travaillé concerne une émission radiophonique sur Yannick Noah ; c’était un extrait du manuel Alter égo2.[9] Le cours avait pour objectif de réviser le Passé composé et l’emploi des marqueurs chronologiques. Le thème abordé « Changement de vie, de voie professionnelle » – une Biographie,a pour principal objectif de susciter chez l’apprenant un réel intérêt pour la société française et lui permet de développer des savoir-faire et savoir-être. Après avoir distribué le texte photocopié, l’enseignante a demandé aux apprenants d’identifier la photo qui est dans le texte, regarder le programme de France 2. Cette étape est suivied’une discussion sur Yannick Noah.
D’après le plan préparé, l’enseignante avait envie de faire écouter le texte et demander aux apprenants de compléter le mail,mais ce qui se passe dans la réalité : c’est qu’elle a demandé au départ de plier le texte (elle faisait recours aux gestes) et d’écouter l’enregistrement de l’émission pour compléter le mél. Cette écoute est suivie d’un petit échange entre les apprenants et pour que l’échange soit idéal, elle a divisé la classe en groupes.Unequestion posée par l’un des apprenants bloque, à notre avis, la suite des consignes. La deuxième écoute est faite pour que les apprenants vérifient le mail alors que l’enseignante a demandé tout de suite de réécouter pour compléter le parcours de Yannick Noah, en particulier, les dates dans la biographie de Yannick Noah. Cette consigneest, apparemment, une déviation du cours.Cette déviation, comme l’a expliqué très clairement l’enseignante remonteà sa grande expérience ; elle a estimé que ses apprenants avaient du mal à déchiffrer les mots du mail. Si c’était pour cette raison ou une autre, le résultat reste le même : l’enseignante a montré une marge de la liberté par rapport au manuel.La nécessité du manuel doit conduire l’enseignante aussi à se dire, comme l’a montré très clairement Hélène Sabbah, un auteur et un directeur de collection chez Hatier : « J’ai là une matière qui correspond à ce que l’on me demande d’enseigner mais à partir de là, je peux broder, je peux partir dans telle ou telle direction, je peux utiliser mon manuel comme je veux. Je pars du début ou bien je commence avec des textes qui sont à la fin, le tout c’est d’être responsable ce que l’on veut, de savoir l’expliquer, de savoir le justifier constamment en fonction d’objectifs précis, en fonction d’une démarche que l’on maîtrise et donc d’un enseignement qu’on met en place avec l’aide du manuel, c’est une aide importante ».[10]
La démarche pédagogique et les supports :
Nous allons à présent analyser ces trois séances en regard à l’introduction, au traitement du Manuel et à la démarche pédagogique adoptée par l’enseignante, nous étudierons en détail les supports utilisés. Puis, nous terminerons cette analyse par les stratégies des apprenants pour acquérir un point avec ou sans manuel.
- En ce qui concerne la première séance – un cours d’Expression et Compréhension Orale – où l’enseignante n’exploite pas du manuel, les documents graphiques, la majorité des exercices proposés sont des exercices structuraux de transformation, de reformulation, de classement ou parfois à trous, c’est-à-dire des exercices « fermés », dans lesquels une seule réponse est possible et considérée comme correcte. L’unique exercice ouvert, dans le cours d’Expression et de compréhension Orale, est une production orale induite, basée sur une bande dessinée. Les apprenants auraient dû raconter l’histoire ou bien jouer le rôle des personnages dans la bande dessinée en utilisant le subjonctif pour exprimer l’opinion et le souhait. Généralement, l’enseignante commence par des exercices fermés pour terminer la séance sur des activités ouvertes à l’oral puis à l’écrit.
- Dans un cours d’Expression et Compréhension Orale où l’enseignante exploite le manuel d’apprentissage Taxi2, les types de documents proposés se diversifient comme l’exemple de l’enquête, ce n’était pas une interview face à face, mais une enquête sous forme de discours rapporté. Les documents authentiques (écrits, iconographiques, sonores) occupent une place importante dans ce manuel.
- Quant aux documents utilisés dans un Atelier de renforcement linguistique, où l’enseignante exploite des extraits de divers manuels, sont censés servir de révision d’un point grammatical déjà étudié dans le cours précédent. Lors de la séance observée dans un cours de renforcement linguistique, l’enseignante commence, en effet, par la double page de Yannick Noah-Comprendre une biographiequi comprend les quatre compétences (écouter, lire, parler, écrire). Cette double page permet souvent d’animer la séance, selon une progression pédagogique déjà validée par les enseignants-référents.Nous avons remarqué que l’enseignante essaie de suivre le parcours de chaque double page de ce manuel : (comprendre, s’exercer, s’exprimer), cela permet, d’après l’enseignante, à la découverte et à l’appropriation des contenus. À notre avis, ces exercices sont faits pour faire travailler les apprenants, et par conséquent, ces derniers sont actifs, développent leur capacités d’apprendre.
- L’enseignante utilise d’abord les mots et les structures grammaticales les plus simples pour aller vers des phrases complètes en augmentant peu à peu la difficulté. Au début, elle utilise beaucoup de signes non-verbaux (gestes), elle explique plusieurs fois les mêmes choses en utilisant à chaque fois une consigne différente pour que chacun puisse trouver l’explication qui lui convient, qui lui parle. Par expérience, nous avons remarqué que la répétition était une étape nécessaire dans l’apprentissage de la langue, et l’enseignante, dans ce cours s’efforce de faire parler, et de se communiquer. Le long de l’échange, l’enseignante est amenée à évaluer la mise en œuvre des savoir-faire des apprenants.
- Ainsi, de manière générale, l’enseignante utilise fréquemment le « oui » et le « non » pour ponctuer la prestation des apprenants, et parfois « très bien » ou « d’accord » pour valider des propositions de réponses ou des énoncés; ensuite elle signale implicitement des difficultés avec des expressions comme « tout le monde est d’accord ? ».
- Les apprenants tiennent un rapport direct avec le manuel dont se sert leur enseignante le plus.
- L’enseignante exploite de plusieurs manuels, mais elle préfère adopter Alter Ego2, dans un Atelier de renforcement linguistique.
- Les exercices sont variés : il s’agit d’exercices de découverte et d’application, qui se présentent sous la forme d’exercices fermés et des exercices de jeu de rôle et de communication en tant qu’exercices ouverts.
- Le choix des documents est divers. (une bande dessinée, une émission radiophonique et une enquête), mais les supports sont peu variés, surtout parce que l’agencement des salles offre bien plusieurs possibilités.Dans les cours observés,les enseignantes avaient recours aux cassettes et CD lors de passage à l’oral.
Les stratégies de l’« enseignant-apprenants » :
Les apprenants ont, le long des séances auxquelles nous avons assisté, développé des stratégies pour assimiler correctement les points travaillés. En effet, nous avons observé qu’ils faisaient régulièrement usage de leur langue maternelle lorsqu’ils étaient amenés à travailler en groupe. Comme la classe était dominée par les chinois, l’usage de leur langue maternelle était courant. Dès le début du cours, l’organisation du travail est individuel, une demie heure après, le travail se fait en groupe binôme ou trinôme ; à savoir que la discussion avec l’enseignante est rare sauf s’il ya une question à poser par un apprenant. L’enseignante s’appuie sur une stratégie de sollicitation ; dès que l’enseignante s’adresse aux apprenants et personne ne répond, elle nomme les apprenants.
Le manuel : un outil ou un carcan ?:
« Le manuel peut donner l’impression d’emprisonner, c’est vrai mais il donne aussi beaucoup d’idées à partir du moment où l’on considère qu’il en a et à partir du moment où on considère qu’il donne une matière première qui est une référence vraiment importante pour les élèves ».dit- Hélène Sabbah.
Après avoir observé les trois séances, nous avons remarqué que :
- Le manuel est considéré comme bon fil conducteur dans les cours d’Expression et de Compréhension Orale, mais il est utilisé aussi comme support dans un atelier de renforcement linguistique.Ànotre avis, pour que les deux – apprenants ou enseignants – l’utilisent de manière adéquate dans une classe ou à la maison, il est important de consacrer du temps à leur découverte en tant qu’outil : organisation des parties et des chapitres, organisation d’un chapitre, repérage des contenus à mémoriser et des aides au lecteur (table des matières, index, lexique, mémento, cartes et chronologies).
- L’utilisation d’un manuel ne doit pas se faire de manière servile (qui imite un modèle, qui est étroitement soumis à un modèle, dépourvu d’originalité). Il arrive que certains enseignants ne prennent pas suffisamment de libertés vis-à-vis de leur manuel : celui-ci est au service de ses utilisateurs et non l’inverse.
- Les apprenants devraient apprendre à se servir de leur manuel.
- L’utilisation du manuel devrait faire l’objet d’un apprentissage spécifique permettant à l’apprenant de s’approprier cet outil de travail. En lui donnant l’habitude de circuler dans le manuel en fonction de ses besoins, l’enseignant met les apprenants sur la voie d’un travail plus autonome.
CONCLUSION :
La préparation des cours avec un manuel est une étape très importante pour gagner de temps et d’énergie. La structure du manuel est faite pour proposer à l’enseignant des outils d’animation qui facilitent son travail, en classe, et pourque le manuel remplisse complètementla fonctiond’un « facilitateur » pédagogique, l’enseignant devrait le présenter aux apprenants : le titre, la quatrième de couverture, le sommaire, l’avant-propos – le mode d’emploi, et la maquette intérieure. Cette familiarisation des apprenants avec le manuel est particulièrement importante dans le processus de l’apprentissage d’une langue étrangère. Pour clore cette étude, nous tenons à souligner que l’utilisation d’un manuel« ne signifie pas nécessairement le suivre scrupuleusement de la première à la dernière page. Un manuel … n’est un carcan que pour celui qui s’y laisse enfermer. Ce n’est pas parce qu’un enseignant utilise un manuel qu’il ne peut pas partir des situations … de la vie de classe. Le manuel n’est qu’un outil au service des apprentissages. Libre à chacun de l’utiliser de la manière qui lui paraît la plus appropriée pour assurer l’efficacité des apprentissages de ses élèves. Ceux-ci y trouveront différentes pistes structurées pour mieux maîtriser leurs découvertes : une information nouvelle, une aide à la structuration, des exercices d’approfondissement, des prolongements ludiques… Et il n’y a pas de raison que cela les empêche de créer leurs propres repères avec leurs mots personnels ».[11]
BIBLIOGRAPHIE :
- BERTHETAnnie, HUGOTCatherine, M.KIZIRIANVéronique, SAMPONISBéatrix et WAENDENDRIES Monique.Alter Ego2. Paris : Hachette, 2006.
- CAPELLEGuy, Taxi2, Le Guide pédagogique. Paris : Hachette, 2003.
- CAPUCHO F., DENYER M., LABASCOULE J.et ROYER C., Éditions Maisons des langues, 2007.
- CRIDLIGJean-Marie, DOMINIQUE Philippe, NSF3. Paris : CLE International, 1991.
- GERARD, F.-M. (2006), Un manuel scolaire n’est un carcan que pour celui qui s’y laisse enfermer, Carte blanche, Le Soir, 29 juin 2006, p. 18.Hélène Sabbah, un directeur de collection chez Hatier et auteur – Table ronde « le métier d’auteur », 27/3/1996.
- MENANDROBERT, Paris : Hachette, 2003.
- TROUVEALAIN, Pratiques D’expression, 250 activités pour dire et pour écrire. Paris : Nathan, 1991. Voir : http://www.savoirlivre.com/optimiser-manuel/professeurs.php?page=2
[1]ROBERT MENAND, Taxi2. Paris : Hachette, 2003.
[2]Annie BERTHET, Catherine HUGOT, Véronique M.KIZIRIAN, Béatrix SAMPONIS et Monique WAENDENDRIES, Alter Ego2. Paris : Hachette, 2006.
[3]F. CAPUCHO, M. DENYER, J. LABASCOULE et C. ROYER, Rondpoint3. Éditions Maisons des langues, 2007.
[4]Jean-Marie CRIDLIG, Philippe DOMINIQUE,NSF3. Paris : CLE International, 1991.
[5]ALAIN TROUVE, Pratiques D’expression, 250 activités pour dire et pour écrire. Paris : Nathan, 1991.
[6]Guy CAPELLE, Taxi2, LeGuide pédagogique. Paris : Hachette, 2003, p.95.
[7]ROBERT MENAND, Taxi2, op. cit.,pp. (74-75).
[8]ALAIN TROUVE, Pratiques D’expression, 250 activités pour dire et pour écrire. op.,cit.
[9]Annie BERTHET, Catherine HUGOT, Véronique M.KIZIRIAN, Béatrix SAMPONIS et Monique WAENDENDRIES, Alter Ego2. Dossier 6, Leçon 1 « Changement de vie, de voie professionnelle », op. cit.,pp. (92-95).
[10] Hélène Sabbah, un directeur de collection chez Hatier et auteur – Table ronde « le métier d’auteur », 27/3/1996.
Voir : http://www.savoirlivre.com/optimiser-manuel/professeurs.php?page=2
[11] GERARD, F.-M. (2006), Un manuel scolaire n’est un carcan que pour celui qui s’y laisse enfermer, Carte blanche, Le Soir, 29 juin 2006, p. 18.