
Le droit à l’intégration juridique par la nationalité:
Le cas des femmes immigrées résidant au Maroc
الحق في الاندماج القانوني عن طريق الجنسية – حالة المهاجرات المقيمات بالمغرب –
SADNI Mustapha, Doctorant F.S.J.E.S Souissi, Université Mohamed V – Rabat
ط/د. مصطفى سدني، كلية العلوم القانونية والاقتصادية والاجتماعية السويسي، جامعة محمد الخامس .
مقال نشر في مجلة جيل حقوق الإنسان العدد 38 الصفحة 133.
الملخص:تحظى إشكالية اندماج المهاجرات في المجتمع المغربي بأهمية خاصة، فهي من ناحية نشأت في سياق يتسم بدينامية ملحوظة لتدفقات الهجرة إلى المغرب الذي أصبح بلد استقرار دائم للمهاجرين الأجانب، ومن ناحية أخرى، برزت هذه الإشكالية في سياق قانوني يتسم بملائمة وتحديث التشريع المغربي مع مستجدات الهجرة.
ومن هذا المنطلق، يتضمن تشريع الجنسية مجموعة من الآليات القانونية التي تسمح باكتساب الجنسية المغربية وخاصة عن طريق الزواج المختلط والتجنيس. فاكتساب الجنسية المغربية يعتبر عاملا مساعدا في الاندماج القانوني للمرأة المهاجرة في المجتمع المغربي، ومدخلا أساسيا لإنجاح الاستراتيجية الوطنية للهجرة واللجوء.
الكلمات المفتاحية: الاندماج، الجنسية، الهجرة، التجنيس، الزواج المختلط.Abstract :
The problem of the integration of immigrant women in Moroccan society is interesting: on the one hand, it arises in a migratory context marked by a remarkable dynamic of migration flows to Morocco, which has become a country of definitive settlement for a number of immigrants; on the other hand, it arises in a legal context which leads to a progressive harmonization of the legal arsenal in relation with immigrant living in Morocco.
In this context, the Moroccan Nationality Code has a set of mechanisms enabling the acquisition of Moroccan nationality, in particular by means of mixed marriage and naturalization.
The acquisition of Moroccan nationality is a favorable factor for the legal integration of immigrant women in Moroccan society, and an essential step to the success of the National Immigration and Asylum Strategy.
Key words : Integration, Nationality, Immigration, Emigration, Migration, Naturalization, Mixed marriage.
Introduction
La tendance à la féminisation de la migration est un phénomène mondial. Selon les nations unies, les femmes représentent près de la moitié des 200 millions de personnes vivant dans d’autres pays que celui d’origine (48.6%). Toutefois et jusqu’au début des années 1980, les recherches sur les migrations féminines sont restées peu développées.
L’approche classique du phénomène migratoire partait de l’idée qu’une migration est déclenchée essentiellement pour des raisons économiques, ceci a contribué à la visibilité des hommes migrants travailleurs et à l’invisibilité des femmes migrantes.
Il a fallu attendre les années 1980 pour que la notion de « féminisation » des migrations surgisse dans le champ de la recherche. En effet, les migrantes étaient perçues dans une mobilité dépendante de celle des hommes dans le cadre de la politique du regroupement familial. Dans cette conception, la visibilité de la femme est circonscrite à leur statut de membre de la famille.
De nos jours, les femmes continuent d’émigrer comme au passé, mais parallèlement, de plus en plus de femmes émigrent à titre autonome et constituent parfois la locomotive du fait migratoire[1]. A cet égard, le Maroc, terre des migrations, se démarque des autres pays comparés par l’importance de sa migration féminine, qui touche aussi bien les femmes marocaines émigrantes que les femmes étrangères immigrantes.
Si ces flux migratoires féminins sont bien gérés, ils peuvent constituer un puissant facteur pour la lutte contre la pauvreté et de sous-développement, mais également un facteur d’intégration des immigrées dans les sociétés d’accueils.
Dans ce cadre, les politiques d’intégrations des immigrés se différent d’un pays à l’autre. S’agissant de l’expérience marocaine, une nouvelle feuille de route est née où l’intégration des immigrés occupe une place capitale. À cette fin, des dispositions sont mises en place concernant un certains droits fondamentaux comme le séjour, la scolarisation, la justice, la santé, l’habitat l’emploi et la situation administrative.
Certes, deux opérations de régularisation de la situation administrative des immigrants irréguliers ont été organisées à partir de 2014. Cependant, ces deux compagnes de régularisation n’ont pas modifié significativement la situation des immigrés en termes d’accès à leurs droit fondamentaux, et notamment le droit à l’intégration juridique dans la société marocaine par voie de l’acquisition de la nationalité.
L’intérêt de la recherche
Il s’agit de exactement de présenter les spécificités de la politique nationale en matière de l’immigration, et notamment la problématique de l’intégration des étrangères immigrées dans le tissu social marocain. De ce constat découle l’importance de l’intégration juridique de la femme immigrante comme un élément favorable pour la réussite du model marocain de l’intégration.
L’objectif de la recherche
La présente contribution a pour objectif de déterminer le rôle de l’acquisition de la nationalité dans le processus de l’intégration juridique des femmes immigrées dans la société marocaine. Il s’agit exactement d’apprécier le modèle marocain de l’intégration par voie de la nationalité en analysant les différentes modalités permettant l’acquisition de la nationalité marocaine prévues par la législation en vigueur.
La problématique de la recherche
De ce fait notre problématique centrale s’articule autour de la question suivante : dans quelle mesure les dispositions juridiques relatives à l’acquisition de la nationalité marocaine constituent un facteur favorable pour la réussite du modèle marocain de l’intégration des immigrées.
De cette problématique découle les questions suivantes :
Quelles sont les principales spécificités de la politique marocaine de l’intégration ?
Quelles sont les spécificités juridiques de l’intégration par voie du mariage mixte ?
Quelles sont les spécificités juridiques de l’intégration par voie la naturalisation ?
Les hypothèses de la recherche
A partir de la problématique centrale de la recherche et les questions annexes, on peut formuler les des hypothèses suivantes :
Le Maroc, pays leadership en matière de la gestion des flux migratoires, favorise volontairement un modèle d’intégration multidimensionnel touchant à la fois les volets économique, social, culturel et juridique, et permettant une meilleure intégration de le femme immigrée dans la société marocaine.
De point de vue pratique, la vision marocaine relative à l’intégration se heurte à des obstacles de nature sécuritaires et juridiques menaçant ainsi les enjeux humains de cette vision, formulée selon une démarche participative et intégrée.
La méthodologie de la recherche
Pour approcher cette problématique et répondre aux questionnements annexes, nous allons opter pour une méthodologie analytique qui permettrait de décomposer le statut juridique régissant l’acquisition de la nationalité marocaine par voie du mariage et par voie de la naturalisation, à fin de dégager les principales spécificités de cette procédure.
Le plan de la recherche
Pour le faire, nous allons procéder à une étude théorique et conceptuelle de notre sujet (I), ensuite, nous déterminons les différentes spécificités juridiques de l’intégration des femmes immigrées par l’acquisition de la nationalité marocaine (II).
Les spécificités de la politique marocaine d’immigration, élément de réflexion
Cadre théorique et conceptuel
La migration
Les termes « déplacement », « migration » sont utilisés pour définir la mobilité d’une population, qu’elle soit professionnelle, spatiale…les migrations peuvent se définir comme un ensemble de déplacements ayant pour effet de transférer la résidence des intéressés d’un certain lieu d’origine ou lieu de départ à un certain lieu de destination ou lieu d’arrivée.
La migration se caractérise donc essentiellement par le fait qu’elle entraîne un changement de domicile ou de lieu de résidence « habituel » et que la vie reprend dans un lieu nouveau ou différent[2].
Selon de la définition du centre national de ressources textuelles et lexicales (CNRTL), la migration signifie le déplacement de personnes d’un lieu vers un autre, en particulier d’un pays (émigration) à un autre (immigration) pour des raisons politiques, sociales, économiques ou personnelles, et qui est fait soit d’une population entière, soit d’individus s’intégrant dans un phénomène de société plus large[3].
L’émigration
L’émigration vient du verbe émigré, c’est-à-dire quitter un pays pour s’installer dans un autre. Le préfixe “é” de ce verbe est une variante de ex, qui signifie hors de. C’est donc par rapport au pays de départ qu’on parle d’émigration.
Selon l’organisation internationale pour les migrations, l’émigration signifie l’action de quitter son Etat de résidence pour s’installer dans un Etat étranger[4].
Le droit international reconnaît à chacun le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et n’admet sa restriction que dans des circonstances exceptionnelles. Ce droit de départ ne s’accompagne d’un aucun droit d’entrer sur le territoire d’un Etat que l’Etat d’origine.
L’immigration
L’immigration est l’action d’immigrer, c’est-à-dire le fait de venir dans un pays pour s’y fixer de manière temporaire ou définitive. En 1990, dans le premier rapport du haut conseil à l’intégration français, est explicitement définie cette notion. La définition retenue pour l’immigré est alors fonction d’un double critère, le lieu et la nationalité de naissance : “L’immigré est une personne née étrangère dans un pays étranger, mais qui vit en France qu’elle ait ou non acquis la nationalité française”.
Sont exclus de cette définition, les personnes nées françaises à l’étranger, les Français par acquisition nés en France et les étrangers nés en France[5].
L’intégration
Selon Le haut conseil de l’intégration français, le terme intégration (généralement référé à la situation des immigrés installés de façon durable dans le pays d’accueil) désigne à la fois un processus et les politiques qui ont pour objet de faciliter sa mise en œuvre.
Le haut conseil a considéré “qu’il faut concevoir l’intégration non comme une voie moyenne entre assimilation et insertion, mais comme un processus spécifique qui suscite la participation active à la société nationale d’élément variés et différents tout en acceptant la substance de spécificité culturelles, sociales et morales et en tenant pour vrai que l’ensemble s’enrichit de cette variété, de cette complexité.
Sans nier les différences, mais sans les exalter, c’est sur les ressemblances et les convergences qu’une politique d’intégration met l’accent afin, dans l’égalité des droits et des obligations, de rendre solidaires les différentes composantes ethniques et culturelles de notre société et de donner à chacun qu’elle que soit son origine, la possibilité de vivre dans une société dont il a accepté les règles et dont il devient un élément constituant. Bien entendu, une politique d’intégration implique l’adhésion de tous à un minimum de valeurs communes”[6].
En sociologie, Durkheim ou l’École de Chicago la définie comme un processus par lequel l’individu prend palace dans une société, par lequel il se socialise. Ainsi, elle est le processus ethnologique qui permet à une personne ou à un groupe de personnes de rapprocher et de devenir membre d’un autre groupe plus vaste par l’adoption de ses valeurs et des normes de son système social[7].
L’assimilation
L’assimilation signifie l’adhésion complète de l’étranger par une conversion des mentalités et des comportements aux normes et modes de vie de la société d’accueil. Elle est conçue comme un processus sans retour, l’abandon du particularisme pour se fondre dans la société d’accueil[8]. L’assimilation suppose que l’étranger se fond dans la société d’accueil et en adopte la mentalité, les comportements, les normes et les modes de vie. Il y’a plus de caractère d’extranéité dans cette situation qui pousse à l’obtention irréversible de la nationalité.
L’organisation internationale pour les migrations (OIM) définit l’assimilation comme suit : « processus par lequel un premier groupe social ou ethnique généralement minoritaire adopte les trais culturels (langue, traditions, valeurs, mœurs…) d’un second groupe, généralement majoritaire. L’adoption se traduit par une altération du sentiment d’appartenance[9].
L’insertion
L’insertion consiste à reconnaître à l’étranger la place qu’il occupe dans une économie, un cadre social et culturel à préserver, au moins partiellement, l’identité d’origine, les spécificités culturelles, les modes de vie…
L’insertion reconnaît à l’étranger la place qu’il occupe, tout en préservant son particularisme d’origine, ses spécificités culturelles et son mode de vie[10].
En outre, l’insertion est une notion administrative qui sert de qualificatif à différentes dispositifs de politique sociale mise en place par l’Etat. Elle est une catégorie d’action publique visant à pallier les défaillances des mécanismes d’intégration à un niveau essentiellement individuel[11].
L’étranger
Selon la définition de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), un étranger est une personne qui réside en France qui ne possède pas de nationalité française, soit qu’elle possède une autre nationalité (à titre exclusif), soit qu’elle n’en ait aucune (c’est le cas des personnes apatrides).
Les personnes de nationalité française possédant une autre nationalité (ou plusieurs) sont considérées en France comme françaises. Un étranger n’est forcément immigré, il peut être né en France (les mineurs notamment)[12].
S’agissant la législation marocaine, le deuxième paragraphe du premier article de la loi relative à l’entrée et du séjour des étrangers au Royaume du Maroc, à l’émigration et l’immigration irrégulières définit l’étranger comme suit : « On entend par étranger, au sens de la présente loi, les personnes n’ayant pas la nationalité marocaine, n’ayant pas de nationalité connue, ou dont la nationalité n’a pas pu être déterminée »[13].
La nationalité
Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques français (INSEE), la nationalité est le lien juridique qui relie un individu à un Etat déterminé. De ce lien découlent des obligations à la charge des personnes qui possèdent la qualité de français, en contrepartie desquelles sont conférés des droits politiques, civils et professionnels, ainsi que le bénéfice des libertés publiques.
Selon la doctrine française, le terme de nationalité désigne une notion de droit, mais aussi une notion de fait. Certes, la nationalité de fait est l’appartenance à une communauté dont la notion relève de la sociologie. Quant à la nationalité de droit, elle signifie l’appartenance juridique d’une personne à la population constitutive d’un Etat[14].
La doctrine et la législation marocaines et comparées en matière de la nationalité, prévoient deux modalités de l’acquisition de la nationalité : par le bien fait (naissance et résidence, mariage mixte…) de la loi et par la naturalisation.
Le mariage mixte
Le terme mixte signifie quelque chose qui comprend deux ou plusieurs éléments de nature différente. Un mariage mixte peut se manifester à plusieurs niveaux, il se rapporte à la nationalité (mariage transnational), race et/ou couleur, ethnie (mariage inter-ethnique), culturel (mariage interculturel), religion du conjoint (mariage inter-religieux).
Ainsi, un couple mixte serait un couple qui unit des partenaires dissemblables, issus de deux groupes hétérogènes, potentiellement antagonique. C’est toute union conjugale conclue entre les personnes appartenant à des religions, à des ethnies ou à des races différentes, si ces différences provoquent une réaction de l’environnement social[15].
Concernant la législation marocaine, la loi sur la nationalité n’a pas cité une définition du terme, mais plutôt elle a déterminé les conditions requises pour qu’une femme étrangère qui se marie avec un homme marocain, acquière la nationalité marocaine.
Cependant, l’acception de la déclaration de l’acquisition de la nationalité par voie du mariage mixte est conditionnée par le non opposition du ministère de la justice. Dans ce cas-là, la femme étrangère dispose d’une autre modalité pour acquérir la qualité marocaine, c’est par la naturalisation.
La naturalisation
La naturalisation vient du verbe naturaliser, c’est-à-dire le fait de donner à un étranger le statut juridique et les droits attachés à une nationalité déterminée. En d’autre terme c’est l’acte par lequel l’Etat octroi la nationalité à un étranger qui la demande.
Selon la doctrine française, la naturalisation est une concession de la nationalité française par le gouvernement français à l’étranger qui la demande [16]; c’est l’octroi de la nationalité française par le gouvernement à l’étranger qui la demande[17].
Quant à la doctrine marocaine, la naturalisation est l’octroi de la qualité marocaine par l’autorité compétente à une personne étrangère qui satisfait un certain nombre de conditions[18]. De même, c’est un don octroyé par l’Etat en vertu du pouvoir discrétionnaire de l’autorité compétente en faveur d’un étranger qui la demande après la satisfaction des conditions prévues par la loi[19].
Bref, on peut dire que la naturalisation est la combinaison de deux volontés, celle de l’étranger et de l’Etat. La première se concrétise par une demande expressément manifeste la volonté de la personne intéressée à acquérir la nationalité, c’est donc un acte volontaire. Quant à la deuxième, elle est liée à l’accord de l’Etat, car ce dernier dispose d’un pouvoir discrétionnaire et souverain en la matière.
Présentation de la politique nationale d’immigration
Initialement le Maroc était considéré comme une terre d’émigration ou de transit vers l’Europe. Depuis le début des années 2000, le Maroc est devenu un pays d’accueil d’immigrés provenant de l’Afrique subsaharienne et du moyen Orient mais plus en plus d’Asie et d’Europe.
Face aux différents et profonds changements des dynamiques migratoires, le Maroc a choisi souverainement de mettre en place une nouvelle politique migratoire, basée sur une approche humaniste, cohérente et globale.
En effet, le Maroc a pris un ensemble de mesures concernant les migrants, afin de protéger leurs droits et libertés fondamentales grâce à la stratégie nationale d’immigration et d’asile.
Cette stratégie, a permis d’aboutir à quatre grands objectifs, à travers une approche participative et qui sont : faciliter l’intégration des immigrés réguliers, mettre à niveau le cadre réglementaire, mettre en place un cadre institutionnel adapté et gérer les flux migratoires dans le respect des droits de l’homme.
À cette fin, la stratégie marocaine comporte onze programmes touchant des domaines fondamentaux, à savoir : l’éducation, la santé, le logement, l’assistance sociale et humanitaire, la formation professionnelle et l’emploi, la gestion des flux migratoire et la lutte contre la traite des êtres humains, la coopération et partenariat internationaux, la gouvernance et la communication, le cadre conventionnel et réglementaire. Au niveau interne, le Maroc dispose d’un cadre juridique cohérent pour la migration, conformément à la loi n° 02-03 relative à l’entrée et au séjour des étrangers au Royaume du Maroc, à l’émigration et l’immigration clandestine.
Cette loi fait l’objet actuellement d’une refonte en vue de l’adapter au contexte migratoire actuel du pays. Aussi, la loi n° 27-14 relative à la lutte contre la traite des êtres humains a été adoptée en 2016, et la loi sur la nationalité marocaine révisée en 2006.
Constitutionnellement parlant, l’article 30 stipule que : « Les étrangers jouissent des libertés fondamentales reconnues aux citoyens marocains, conformément à la loi. Ceux d’entre eux qui résident au Maroc peuvent participer aux élections locales en vertu de la loi, de l’application de conventions internationales ou de pratiques de réciprocité ».
Au niveau international, le Maroc participe positivement, en tant que membre de l’OIM, à un certain nombre d’initiatives animées par celle-ci. Il est aussi membre du comité exécutif du HCR depuis 1979, et signataire de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés.
Ainsi, le 10er et 11 décembre 2018 à Marrakech, le Maroc a accueilli la Conférence inter-gouvernementale chargée d’adopter le Pacte mondial pour les migrations sûres, ordonnées et régulières. La Déclaration du Marrakech comprend 23 objectifs pour une bonne gouvernance migratoire.
Certes, l’objectif n° 04, intitulé « munir tous les migrants d’une preuve d’identité légale et de papiers adéquats », la mesure (e) relative à son application prévoit le renforcement des dispositions qui visent à déduire les cas d’apatridie, notamment par l’enregistrement des naissances des migrants, en veillant à ce que les femmes et les hommes disposent de la même capacité de transmettre leur nationalité à leurs enfants et en accordant la nationalité aux enfants nés sur le territoire d’un autre Etat.
Quant à l’objectif n° 16, celui-ci est relatif à l’intégration des immigrés dans la mesure où il prévoit la nécessité de donner aux migrants et aux sociétés des moyens en faveur de la pleine intégration et de la cohésion sociale. À fin de tenir cet objectif, un ensemble de mesures d’action ont été retenues. La mesure (c) prévoit la définition des objectifs politiques nationaux à court, moyen et à long terme en vue de l’intégration des migrants dans la société, notamment en ce qui concerne le marché du travail, le regroupement familial…
Si les domaines d’intégration (économique, social, culturel) énoncés par le pacte de Marrakech et visé par le Maroc sont nécessaires pour une bonne intégration dans la société marocaine, ils restent néanmoins insuffisants car ils n’ont pas rapproché le volet juridique relatif à la nationalité comme forme d’intégration des immigrés dans le tissu national.
La nationalité, forme d’intégration juridique dans la société marocaine
Le droit constitue un outil de taille qui contribue à l’intégration des immigrés dans les pays d’accueils. En effet, le droit peut faciliter le processus d’intégration par des mesures favorisant la concrétisation du principe de la légalité de traitement entre les étrangers et les nationaux, pour lutter contre les phénomènes d’exclusion politique et social en offrant à tous les mêmes chances pour la promotion sociale.
Le droit peut, en outre, prévenir et sanctionner les différentes formes de discrimination vis-à-vis des immigrés étrangers et assurer pleinement le droit d’acquérir la nationalité du pays de résidence. En revanche, le droit peut constituer un frein à tout processus intégrationniste, il peut même être manipulé dans un sens qui génère le séparatisme et les exclusions.
Dans cette optique, le droit à une nationalité est parmi les droits garantis par les conventions et traités internationaux, il permet aux étrangers et les nationaux une reconnaissance au niveau national et international. Une telle reconnaissance garantira une protection diplomatique dans la société internationale, tandis qu’au niveau interne, le droit à une nationalité permettra aux nationaux et aux immigrés de jouir, sur le même pied d’égalité, des droits politiques économiques sociaux et culturels.
L’acquisition de la nationalité est donc un instrument réglementaire de base, parmi d’autres, qui permet à l’immigré étranger une intégration juridique dans la société d’installation. Dans ce cadre, l’immigrée étrangère installée sur le territoire marocain a commencé progressivement leur entré sur la scène migratoire marocain.
En effet, 43.5% (36517) des immigrés résidant au Maroc (recensement général de la population et de l’habitat en 2014) sont de sexe féminin, contre 56.5% (47484) de sexe masculin[20].
Cependant, la femme immigrée demeure toujours doublement victime : de son statut immigrée et de son statut genre. En tant que femme, l’immigrée est victime d’exclusion social, 60% des immigrées installées au Maroc sont de provenance des pays sous-développés, 31.6% entre elles sont célibataires, 50.5% sont chaumées, 19.4% sont chefs de ménages.
En tant qu’immigrante, la femme étrangère, soufre de la complexité des procédures administratives permettant l’acquisition de la nationalité marocaine, ce qui nous incite à s’interroger sur les différentes modalités de l’acquisition de la nationalité dans la législation marocaine.
L’acquisition de la nationalité marocaine par mariage mixte
Selon le RGPH (2014), les immigrés résidant sur le territoire national appartenant à la tranche d’âge ] 25-49 ans[ constitue 43% de l’ensemble des immigrés. La jeunesse de cette catégorie majoritaire et son accès au marché du travail, l’incite à contracter des actes de mariage avec les marocains ou bien avec les marocaines dans le cadre du mariage mixte.
Cependant, le mariage mixte soulève des problématiques juridiques et pratiques au niveau de l’effet cet acte conjugal sur la nationalité de deux conjoints, les enfants et les problèmes liés à garde, de fait que le mariage est fortement lié à la doctrine islamique[21], ce qui génère des difficultés d’ordre social, humanitaire et juridique.
De point de vue juridique, et avant 1958, la femme étrangère qui se mariait avec un Marocain ne pouvait, en aucun cas, acquérir la nationalité de son mari, puisqu’aucune disposition légale ne permet cette acquisition.
Néanmoins, les dispositions édictées en la matière par le code de la nationalité de 1958 n’entraînent pas une acquisition automatique et obligatoire de la nationalité marocaine au profit de la femme étrangère qui épouse un Marocain.
En effet, une déclaration en vue d’acquérir la nationalité de son mari doit être faite par la femme, et adressée au ministre de la justice, qui statue sur cette déclaration dans un délai de six mois. La femme immigrée doit également justifier sa résidence habituelle et régulière au Maroc depuis au moins deux ans.
En 2006, la loi sur la nationalité a subi des modifications qui ont favorisé l’égalité du sexe en matière du transfert de la nationalité marocaine des parents au profit de leurs enfants. La nouvelle version de ladite loi a apporté également des dispositions nouvelles sur la condition de la femme étrangère.
Certes, le législateur marocain a augmenté la durée de la résidence régulière et habituelle au Maroc, à partir de laquelle la femme étrangère peut adresser sa déclaration pour acquérir la nationalité marocaine, de deux ans à cinq ans. De plus, le mariage prend effet à compter de la date de dépôt de la déclaration, contrairement à la disposition de l’ancienne version de la loi qui a fixé cette date à partir de la date de la conclusion de l’union conjugal.
De même, le délai fixé par la loi pour statuer sur ladite déclaration par le ministre de la justice est également augmenté de six mois à un an, et le non opposition du ministre dans ce délai ne vaut plus acceptation implicite, cette dernière doit être explicite.
Le ministre de la justice dispose donc d’un pouvoir discrétionnaire pour accepter ou refuser la déclaration de l’acquisition de la nationalité marocaine par voie de mariage mixte, ce qui signifie que cette législation n’applique pas le principe de l’unité de nationalité dans le mariage mixte, ce dernier n’entraîne pas nécessairement la perte de la nationalité d’origine de la femme étrangère. Quant aux conditions légales relatives à l’acquisition de la nationalité par voie de mariage mixte, l’article 10 du code de la nationalité marocaine de 2006, stipule que la femme étrangère qui a épousé un Marocain peut, après une résidence habituelle et régulière au Maroc du ménage depuis cinq ans au moins, souscrire, pendant la relation conjugale, à une déclaration adressée au ministre de la justice, en vue d’acquérir la nationalité marocaine.
En effet, la femme candidate à acquérir la qualité marocaine par voie de mariage mixte doit satisfaire les conditions suivantes :
La femme immigrée doit avoir contracté un mariage valable avec un Marocain et au moment de la déclaration d’acquisition. L’acte de mariage devrait être apprécié au regard des règles du statut personnel de chacun des époux. En réalité elles ne le sont qu’au regard de la loi du mari.
Le ménage doit avoir eu une résidence habituelle et régulière au Maroc depuis cinq ans au moins.
Après l’expiration de ce délai minimum de cinq ans, la femme étrangère doit souscrire à une déclaration en vue d’acquérir la nationalité marocaine.
Cette déclaration d’acquisition ne doit pas avoir l’objet d’une opposition explicite ou implicite dans le délai d’un an de son dépôt de la part du ministère de la justice.
Si ces conditions sont remplies, la nationalité marocaine est acquise à la femme, et ce avec effet rétroactif à compter de la date du dépôt de la déclaration.
De ce fait, le législateur marocain n’a pas imposé à la femme étrangère de perdre sa nationalité d’origine en vue d’acquérir la nationalité marocaine, ce qui rend la femme binationale[22].
La loi marocaine sur la nationalité favorise par conséquent le principe de l’indépendance de la nationalité dans la famille, dans la mesure où elle consolide la liberté de la femme de déclarer l’acquisition de la nationalité marocaine par voie du mariage mixte sans contraintes, toute en satisfaisant les conditions requises.
Toutefois, la déclaration de l’acquisition de la nationalité par voie du mariage avec un marocain peut être objet d’une opposition explicite ou implicite, et ce dans le cadre du pouvoir discrétionnaire dont dispose le ministre de la justice en vertu de l’article 27 du code de la nationalité. De même le ministère public peut également contester la validation d’une déclaration ayant fait l’objet d’un acquiescement explicite ou implicite, ou par toute personne intéressée devant le tribunal d’instance.
Tableau n° 01 : L’action du ministère public en matière de la contestation de la validation des déclarations de l’acquisition de la nationalité marocaine (2018).
Nombre de dossier | Total | |
Cours de 1ère instance | Cours d’appels | |
00 | 09 | 09 |
Source : Rapport annuel sur la mise en œuvre de la politique pénale et l’amélioration du rendement du ministère public au titre de l’année 2018.
Néanmoins, la femme immigrante déclarante l’acquisition de la nationalité par voie du mariage mixte, et qui a fait l’objet d’une opposition explicite ou implicite par l’autorité compétente ; a le droit d’engager une autre procédure de l’acquisition de la qualité marocaine, cette fois par voie de la naturalisation.
L’acquisition de la nationalité marocaine par naturalisation
Rappelant que la naturalisation est l’octroi de la qualité marocaine par l’autorité compétente à une personne étrangère qui satisfait un certain nombre de conditions. Généralement on distingue entre deux types de naturalisation : la naturalisation de droit commun qui est une naturalisation simple ou ordinaire, et la naturalisation par faveur, d’exception ou privilégiée. Ces deux modes diffèrent entre eux en raison d’une part des conditions particulières prévues et d’autre part de l’autorité compétente pour l’accorder.
S’agissant des conditions de la naturalisation en droit commun (simple ou ordinaire) en vertu de l’article 11 du code de la nationalité marocaine, l’étranger ou l’étrangère doit avoir une résidence habituelle et régulière au pays pendant les cinq années précédentes le dépôt de sa demande auprès du ministère de la justice, et résider au Maroc jusqu’à ce qu’il soit statué sur cette demande. Une résidence est habituelle lorsqu’elle est effective et permanente, et constitue ainsi le véritable centre de vie de l’intéressé. Ainsi, une résidence est régulière lorsqu’elle satisfait aux conditions légales relatives au séjour des étrangers[23].
De point de vue pratique, l’expérience marocaine en matière de la gestion migratoire démontre que la naturalisation des immigrés touche les deux sexes avec la prédominance des masculins. Le tableau suivant détermine le taux de féminisation des étrangères naturalisées.
Tableau n° 02: Taux de féminisation des immigrés naturalisés (Octobre 1958 – Octobre 2019).
Effectif | Pourcentage (%) | |
Immigrés masculins | 449 | 62.2 |
Immigrées Féminines | 273 | 37.8 |
Totale | 722 | 100 |
Source : Elaboré par l’auteur à partir des bulletins officiels publiés sur le site Internet du Secrétariat général du Gouvernement Marocain.
En outre, l’étrangère doit être majeur au moment du dépôt de la demande, et être sain de corps et d’esprit, et avoir une bonne conduite et de bonnes mœurs et ne pas avoir fait l’objet de condamnation pour : crime, délit infamant, actes constituant une infraction de terrorisme, actes contraires aux lois de la résidence légale au Maroc, ou actes entraînant la déchéance de la capacité commerciale, non effacé dans tous les cas par la réhabilitation.
Également, l’intéressé doit justifier d’une connaissance suffisante de la langue arabe, et de moyens d’existence suffisants. En réalité cette condition soulève des problématiques juridique et pratique. Là il s’agit d’une certaine “assimilation” à la communauté marocaine en ce qui concerne la langue officielle du royaume.
Juridiquement parlant, la langue arabe n’est pas la seule langue officielle, dans la mesure où la nouvelle constitution de 2011 a constitutionalisé également la langue amazighe comme langue officielle, et que le gouvernement a publié la loi organique qui définit le processus de la mise en œuvre du caractère officiel de cette langue et les modalités de son intégration dans l’enseignement et aux domaines prioritaires de la vie publique[24].
En pratique, ladite condition se heurte également avec une réalité pratique et quotidienne, c’est celle de la diglossie de l’Amazigh. Ainsi, le législateur n’a pas précisé le degré de la “connaissance suffisante” de la langue arabe, est ce qu’il s’agit de la maîtrise orale ou écrite.
De plus, la loi de la nationalité n’a pas précisé la religion du candidat à la naturalisation, ce qui constitue pour nous, un avantage pour l’étranger dans la mesure où elle élargit le champ de l’application de ladite condition, et permet à l’intéressé de se naturaliser quel que soit sa religion et sa lieu de naissance.
Le tableau suivant détermine la structure des immigrés naturalisés par pays de naissance. Ces derniers comportent 31 pays avec la prédominance des pays arabes et musulmans.
Tableau n° 03: Répartition des immigrés naturalisés par zones géographiques de naissance (Octobre 1958 – Octobre 2019).
Féminin | Masculin | Total | |||
Effectif | Pourcentage (%) | Effectif | Pourcentage (%) | ||
Pays Arabes | 252 | 38.24 | 407 | 61.76 | 659 |
Pays Islamiques | 257 | 38.42 | 412 | 61.58 | 669 |
Pays Subsahariens | 01 | 11.12 | 08 | 88.88 | 09 |
Pays grands Maghreb | 204 | 39 | 319 | 61 | 523 |
Pays Nord-africains | 206 | 38.28 | 332 | 61.71 | 538 |
Pays Européens | 13 | 34.21 | 25 | 65.79 | 38 |
Pays Asiatiques | 50 | 37 | 85 | 63 | 135 |
USA | 01 | 50 | 01 | 50 | 02 |
Source : Elaboré par l’auteur à partir des bulletins officiels publiés sur le site Internet du Secrétariat général du Gouvernement Marocain.
En outre, l’octroi de la qualité marocaine est conditionné également par une demande rédigée par l’étranger et adressée au ministre de la justice accompagnée des titres et des documents justificatifs.
Si ces conditions ne sont pas remplies, la demande fait l’objet d’une décision d’irrecevabilité motivée ; et si les conditions légales sont remplies, le ministre peut, par une décision qui est motivée à l’intéressé, rejeter la demande. Ce rejet n’a pas à être motivé.
L’Etat a donc une pleine liberté afin d’apprécier s’il lui semble souhaitable, ou non, d’accorder sa nationalité à la personne qui la demande, alors que, dans les autres cas d’acquisition, il ne peut que vérifier si les conditions légales sont remplies[25].
Cependant, ce pouvoir discrétionnaire dont dispose l’Etat en matière de l’octroi de la nationalité par voie de naturalisation est conditionné par le non détournement de pouvoir par l’administration, car l’intéressé a le droit de demander l’annulation de la décision explicite ou implicite de l’administration pour excès de pouvoir devant la juridiction administrative dans les délais habituels du recours contentieux[26].
Une fois que les conditions précitées ci-dessus sont bien remplies, et s’il y a une acceptation de la demande de la naturalisation, celle-ci serait publiée au bulletin officiel. On parle de la publication d’un acte de naturalisation[27].
Quant à la naturalisation exceptionnelle ou par faveur, celle-ci s’accorde dans le cas où l’étranger a rendu un ou des services bénéfiques au pays.
À titre d’exemple, le chanteur algérien « Cheb Khaled »[28], l’entraîneur français « Henri Michel », l’acteur français « Gérard DARMON »[29], le joueur algérien « Lamine Wahab »[30] ont tous bénéficié de la nationalité marocaine par faveur accordée par Dahir.
Le tableau suivant montre la structure des immigrés par type de naturalisation (ordinaire par décret ou exceptionnelle par dahir).
Tableau n° 04: Répartition des immigrés par type de la naturalisation (Octobre 1958 – Octobre 2019).
Effectif des naturalisés | Pourcentage (%) | |
Par Dahir | 203 | 28 |
Par décret | 519 | 72 |
Totale | 722 | 100 |
Source : Elaboré par l’auteur à partir des bulletins officiels publiés sur le site Internet du Secrétariat général du Gouvernement Marocain.
Nonobstant des conditions prévues par la naturalisation simple, le candidat à acquérir la nationalité marocaine en faveur doit satisfait juste les deux conditions suivantes : l’étranger doit être majeur c’est-à-dire avoir 18 ans ou plus, et avoir une bonne conduite, et bien évidemment la publication de l’acte sur le bulletin officiel, la preuve solide de cette acquisition.
Comme c’est le cas de l’acquisition de la nationalité par le bien fait de la loi (acquisition par naissance et résidence au Maroc, par Kafala, et par mariage mixte), la nationalité marocaine acquise par naturalisation produit des effets qui sont individuels et collectifs.
Quant aux effets individuels, la personne qui a acquis la nationalité marocaine jouit à dater du jour de cette acquisition de tous les droits attachés à la qualité de marocain, sous réserve des incapacités pendant une durée de cinq ans. Autrement dit, le naturalisé est soumis à certaines incapacités temporaires qui sont de nature politique et professionnelle.
En effet, l’étranger naturalisé ne peut être investit de fonctions publiques ou de mandats électifs pour l’exercice auquel la qualité de Marocaine est nécessaire, ainsi il ne peut être électeur lorsque la qualité de Marocain est exigée pour l’inscription sur les listes électorales.
Cependant, il y a toujours le risque de la déchéance de la nationalité marocaine au bout de délai de dix ans à compter de la datte de l’acquisition de la qualité marocaine par naturalisation.
Certes, toute personne naturalisée peut être déchue si elle est condamnée, soit pour attentat ou offense contre le souverain ou membres de la famille royale, soit pour un acte qualifié crime ou délit contre la sûreté intérieure ou extérieure de l’Etat, soit pour acte qualifié crime à une peine de plus de cinq ans de réclusion. Ainsi, c’est l’intéressé s’est soustrait à ses obligations militaires, et si il a accompli au profit d’un Etat étranger des actes incompatibles avec la qualité de Marocain ou préjudiciable aux intérêts du pays.
Certains effets liés à l’acquisition de la nationalité concernent les enfants mineurs, on parle habituellement à ce sujet d’effets collectifs de l’acquisition de la nationalité[31]. En effet, l’acte de naturalisation peut accorder la nationalité marocaine aux enfants mineurs non mariés de l’étranger naturalisé. Le tableau suivant met en relief le taux des mineurs immigrés naturalisés.
Tableau n° 05: Répartition par âge des immigrés naturalisés (Octobre 1958 – Octobre 2019).
Effectif | Pourcentage (%) | |
Immigrés majeurs | 296 | 41 |
Immigrés mineurs | 426 | 59 |
Totale | 722 | 100 |
Source : Elaboré par l’auteur à partir des bulletins officiels publiés sur le site Internet du Secrétariat général du Gouvernement Marocain.
Toutefois, les enfants mineurs naturalisés qui étaient âgés de 16 ans ou moins lors de leur naturalisation ont la faculté de renoncer à la nationalité marocaine entre les 18 et 20 ans, conformément à l’article 18 du code de la nationalité marocaine.
Néanmoins, l’acte de la naturalisation peut à tout moment être retiré, suivant des conditions bien précises, lorsqu’il s’agit d’une cause illégitime, c’est-à-dire une faute d’administration, ainsi lorsqu’il y a un usage des moyens frauduleux.
Pour la cause illégitime, l’administration a donné la nationalité par faute, à titre d’exemple lorsqu’il y a un manque de conditions. En outre, l’existence de la faute de l’administration doit être antérieure à la signature de l’acte de la naturalisation. La faute doit être apparue postérieurement à la signature de l’acte de la naturalisation, et le retrait doit intervenir dans un délai d’un an à compter du jour de la publication au bulletin officiel.
Pour l’usage de moyens frauduleux, il se concrétise à travers une déclaration erronée, l’apparition du fait après l’acquisition. L’intéressé doit être averti des accusations adressées contre lui-même pour qu’il puisse se défendre, et cela dans un délai de trois mois à compter du jour de sa convocation.
Pour l’usage de moyen frauduleux, le retrait ne se prescrit pas, c’est-à-dire que le retrait de l’acte de la naturalisation en cas d’usage de moyens frauduleux, il peut intervenir à tout moment là où il est apparu, sans délai.
Conclusion
La question de l’intégration des immigrés, et notamment les femmes immigrées dans les sociétés d’accueil, nécessite un repositionnement de cette problématique afin qu’elle intègre les dimensions humaines, économiques et sociales de l’immigrée, et dénonce tous les choix à caractère sécuritaires, exclusifs et coercitifs.
En effet, la concrétisation de ce défi est conditionnée par la mise en place des réformes profondes et à long terme, de nature économique et sociale, au niveau des pays de départ. Ainsi la coordination et la participation effectives des pays développés attractifs des migrants, dans le processus de la démocratisation politique et économique des projets d’investissement en vue de créer les richesses et de protéger la dignité humaine de l’immigré, ce qui permettra la stabilisation des flux migratoires dans leurs pays d’origine.
S’agissant le modèle marocain de l’intégration, ce dernier est fortement influencé doublement par la nouvelle politique de l’immigration, qui est exceptionnelle dans la région, et les ressources limitées dont dispose le Maroc.
Dans cette optique, le Maroc a décidé volontairement de régulariser la situation administrative des immigrés installés irrégulièrement sur le territoire national. Certes, les deux opérations de la régularisation en 2014 et 2016, constituent un facteur favorable pour la réussite du model migratoire marocain, mais elles restent néanmoins insuffisantes, si elles ne sont pas accompagnées de mesures de nature législative permettant une intégration juridique dans le tissu national.
Résultats
Le code de la nationalité permet en principe aux femmes immigrées d’acquérir la nationalité marocaine, mais ce droit est conditionné par le droit du ministère de s’opposer contre les déclarations dressées pour l’acquisition de la qualité marocaine par voie de naturalisation ou par voie du mariage mixte.
La femme immigrante est placée dans une situation plus favorable que celle de la femme marocaine, car celle-ci ne peut pas juridiquement transmettre sa nationalité marocaine à son époux étranger dans le cadre du mariage mixte. Et la seule procédure dont dispose l’époux étranger est la naturalisation.
L’intégration juridique par l’acquisition de la nationalité marocaine est nécessaire pour la réussite du modèle marocain de l’intégration, mais il reste insuffisant pour une meilleure intégration de la femme immigrée dans le tissu national, s’il n’est pas accompagné par des mesures de nature réglemtaire permettant la simplification des procédures et la réduction des délais.
Recommandations
Le législateur marocain doit relever le défi de l’approche genre dans le code de la nationalité en vue d’accorder à la femme immigrée une discrimination positive lui permettant de promouvoir son statut juridique, sans négliger la consolidation des effets collectifs du mariage mixte sur la situation juridique des enfants issus de ce lien conjugal.
– Le législateur marocain doit mettre à niveau les lois nationales vers une convergence avec les normes internationales, ce qui appelle en premier de ratifier certaines conventions internationales et créer une dynamique et une interaction entre ces instruments internationaux et le droit national surtout que le Maroc a pris des initiatives à dimension internationale dans le domaine de la migration.
– Le législateur marocain doit accélérer le processus d’amendement de la loi sur la nationalité en adoptant le projet de loi n° 19-13 modifiant l’article 10 portant sur l’obtention de la nationalité marocaine.
Bibliographie
- Bensimon DORIS et Lautman François, Un mariage deux traditions Chrétiens et Juifs, paris, CNRS, Université de Bruxelles, Centre national des hautes études juives, 1977.
- François MELIN, droit international privé : droit de la nationalité, 5ème édition, Lextenso-édition, 2012.
- Grazyna Amokran Legutowska, Le mariage islamo-chrétien en France : une approche anthropologique, Thèse de doctorat, Université de Grenoble, 2012.
- HCP, Les résidents étrangers au Maroc, Rabat, 2014.
- Henri BATIFFOL et Paul LAGARDE, Droit international privé, 5ème édition, Librairie générale de droit et de jurisprudence, Paris, 1970.
- HENRI Batiffol, droit international privé, Librairie générale de droit et de jurisprudence, Paris, 1949.
- Jean Derruppé et Jean-Pierre Laborde, Droit international privé, 16ème édition, DALLOZ, 2008.
- L’Organisation international pour les migrations, Droit international de la migration : Glossaire de la migration, n° 09, Genève, 2007.
- L’Organisation international pour les migrations, Droit international de la migration : Glossaire de la migration, n° 09, Genève, 2007.
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- Le Haut Conseil à l’Intégration, 1990-2010 2 ans au service de l’intégration, paris 2010.
- Marc LORIOL, Qu’est-ce que l’insertion ?, Harmattan, Paris, 1999.
- Michel PICOUET, Les migrations, Presse universitaires de France, Paris 1995.
- Michel PICOUET, Les migrations, presses universitaires de France, Paris, 1ère édition, 1995.
- Mohamed KHACHANI, L’émigration au féminine : tendances récentes au Maroc, CARIM, 2009.
- Paul DECROUX, Droit international privé, Edition la Porte, Rabat, 1965.
- Pierre MAYER et Vincent HEUZE, Droit international privé, 7ème édition, Montchrestien, 2001.
- Serge PAUGAM, Concepts clés gravitant autour de l’insertion sociale et professionnelle en sociologie, Presses universitaire de France, 2010.
- Thierry Vignal, Droit international privé, 3ème édition, SIREY, 2014.
Référence en langue arabe
أحمد زوكاغي، أحكام الجنسية في التشريع المغربي، مكتبة دار السلام، الرباط، 2006.
خالد الحمدوني، السياسة الجديدة للمغرب في مجال الهجرة وإشكالية إدماج المهاجرين، أعمال المؤتمر الدولي الأول تحت عنوان: ظاهرة الهجرة كأزمة عالمية بين الواقع والتداعيات، الجزء الثاني، 17/18 أكتوبر 2019 ببرلين.
موسى عبود، الوجيز في القانون الدولي الخاص المغربي، الطبعة الأولى، المركز الثقافي المغربي، الدار البيضاء، 1994.
– مصطفى سدني، المركز القانوني للمرأة والطفل في قانون الجنسية المغربي، مجلة جيل حقوق الإنسان، عدد 36، مارس 2019.
Sites d’internet
https://www.cnrtl.fr/ddfinition/migration, consulté le 16/10/2019 à 11h00.
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[1] – Mohamed KHACHANI, L’émigration au féminine : tendances récentes au Maroc, CARIM, 2009, p 06.
[2] – Michel PICOUET, Les migrations, Presse universitaires de France, 1995, Paris, p 4.
[3] – https://www.cnrtl.fr/ddfinition/migration, consulté le 16/10/2019 à 11h00.
[4] – L’Organisation international pour les migrations, Droit international de la migration : Glossaire de la migration, n° 09, Genève, 2007, p 26.
[5] – Le conseil économique et social français, L’insertion des jeunes d’origine étrangère, 2001, p 6.
[6] – le Haut Conseil à l’Intégration, 1990-2010 2 ans au service de l’intégration, paris 2010, p 23.
[7] – Serge PAUGAM, Concepts clés gravitant autour de l’insertion sociale et professionnelle en sociologie, Presses universitaire de France, 2010, p 04.
[8] – La cour des comptes française, L’accueil des immigrants des populations issues de l’immigration, novembre 2004, p 10.
[9] – L’Organisation international pour les migrations, Droit international de la migration : Glossaire de la migration, n° 09, Genève, 2007, p 09.
[10] – Michel PICOUET, Les migrations, presses universitaires de France, Paris, 1ère édition, 1995 p 84.
[11] – Marc LORIOL, Qu’est-ce que l’insertion ?, Harmattan, Paris, 1999, p 07.
[12] – https://www.insee.fr/fr/metadonnees/définition/c1198, consulté le 15/10/2019 à 10h00.
[13] – la loi n° 02-03 relative à l’entrée et du séjour des étrangers au Royaume du Maroc, à l’émigration et l’immigration irrégulières, publiée au bulletin officiel n° 51620 du 20/11/2003.
[14] – HENRI Batiffol, droit international privé, Librairie générale de droit et de jurisprudence, Paris, 1949, p 57-58.
[15] – Bensimon DORIS et Lautman François, Un mariage deux traditions Chrétiens et Juifs, paris, CNRS, Université de Bruxelles, Centre national des hautes études juives, 1977, p 09.
[16] – Jean Derruppé et Jean-Pierre Laborde, Droit international privé, 16ème édition, DALLOZ, 2008, p 30.
[17] – Henri BATIFFOL et Paul LAGARDE, Droit international privé, 5ème édition, Librairie générale de droit et de jurisprudence, Paris, 1970, p 123.
[18] – موسى عبود، الوجيز في القانون الدولي الخاص المغربي، الطبعة الأولى، المركز الثقافي المغربي، الدار البيضاء، 1994، ص 74.
[19] – أحمد زوكاغي، أحكام الجنسية في التشريع المغربي، مكتبة دار السلام، الرباط، 2006، ص 67.
[20] – HCP, Les résidents étrangers au Maroc, Rabat, 2014, p 09.
[21] – خالد الحمدوني، السياسة الجديدة للمغرب في مجال الهجرة وإشكالية إدماج المهاجرين، أعمال المؤتمر الدولي الأول تحت عنوان: ظاهرة الهجرة كأزمة عالمية بين الواقع والتداعيات، الجزء الثاني، 17/18 أكتوبر 2019 ببرلين، ص 267.
[22] – مصطفى سدني، المركز القانوني للمرأة والطفل في قانون الجنسية المغربي، مجلة جيل حقوق الإنسان، عدد 36، مارس 2019، ص 47.
[23] – Paul DECROUX, Droit international privé, Edition la Porte, Rabat, 1965, p 39.
[24] – La loi organique n° 26-16 du 12 septembre 20109, relative au processus de mise en œuvre du caractère officiel de la langue amazigh et les modalités de son intégration dans l’enseignement et aux domaines prioritaires, bulletin officiel n° 6816 du 26 septembre 2019, p 9314 (version arabe).
[25] – Thierry Vignal, Droit international privé, 3ème édition, SIREY, 2014, p 464.
[26] – Pierre MAYER et Vincent HEUZE, Droit international privé, 7ème édition, Montchrestien, 2001, p 598.
[27] – Le ministère de la justice marocaine publie dans le bulletin officiel des décrets de la naturalisation des étrangers de différentes nationalités ,voir BO (version arabe) n° 2985 du 14/01/1970 p 39, n° 2988 du 04/02/1970 p 358, n° 4055 du 18/06/1990 p 1089, n° 4059 du 15/08/1990 p 1194. Voir également BO (version française) n° 2553 du 29/09/1961 p 1442, n° 3557 du 27/10/1961 p 1585, n° 2548 du 25/08/1961 p 1228, n° 2544 du 28/07/1961 p 1942, n° 2474 du 25/03/1960 p 716, n° 2517 du 20/01/1961 p 92.
Le ministère publie également des Dahirs de la naturalisation des étrangers, voir BO (version arabe) n° 6772 du 25/04/2019 p 2165.
[28] – voir le Dahir n° 1-13-68 du 20/08/2013 portant sur la naturalisation à titre exceptionnel pour Monsieur Khalid Haj Ibrahim (cheb Khakid) né à Oran (Algérie) en 29/02/1960, publié dans le BO n° 6184 du 05/09/2013, page 5960.
[29] – voir le Dahir n° 1-12-12 du 17/06/2012 portant sur la naturalisation à titre exceptionnel pour Monsieur Gérard DARMON né à Paris en 29/02/1948, publié dans le BO n° 6066 du 19/07/2012, page 2480.
[30] – voir le Dahir n° 1-13-110 du 07/11/2013 portant sur la naturalisation à titre exceptionnel pour Monsieur Lamine Wahab né à l’Algérie en 22/12/1984, publié dans le BO n° 6203 du 11/11/2013, page 7005.
[31] – François MELIN, droit international privé : droit de la nationalité, 5ème édition, Lextenso-édition, 2012, p 235.