
Analyse et interprétation du dispositif éducatif, pédagogique et didactiquede l’enseignement traditionnel
El Alaoui Rachid, Doctorant/Université Mohammed V/Maroc, Rabat
مقال نشر في مجلة جيل العلوم الانسانية والاجتماعية العدد 39 الصفحة 121.
Résumé :
L’histoire de l’enseignement traditionnel marocain foisonne d’évènements éducatifs qui méritent un intérêt particulier. Une réflexion s’impose désormais pour pouvoir concevoir l’héritage éducatif de ce pays et de réattribuer à cette forme d’enseignement la place qui lui est due. Dans cet article, nous évoquerons les grandes lignes du dispositif éducatif propre à l’enseignement traditionnel marocain. L’objectif principal de cette recherche est non seulement d’analysersur le plan éducatif certainsévènements historiques propres à l’enseignement traditionnel, mais aussi de contribuer à apporter des éléments de réponses pour des questions qui restent d’actualité, comme par exemple la langue d’enseignement à adopter et la gratuité de l’acte d’enseignement.
Mots-clés :Enseignement traditionnel, Madarisse Attika, Mosquée Al Quaraouiyine, Précepteur, Waqf.
Introduction :
L’enseignement marocain n’est nullement moderne, et son enseignement traditionnel n’a jamais été traditionnel, ce n’est rien qu’une confusion sourde et factice, conjuguée à une dichotomie proverbiale etanachronique, et ce qui nous imposeconséquemment à mettre en avantun bon nombre de définitions à adopter avec circonspection.
Le Conseil Supérieur de l’Éducation, de la Formation et de la Recherche Scientifique a défini l’enseignement traditionnel marocaincomme « l’ensemble des formes de penser, de sentir et d’agir socialement que l’organisation d’abord tribale puis communautaire met à la disposition des jeunes apprenants marocains (les ruraux notamment, mais pas uniquement), et dont la transmission des savoirs classiques se fait le plus souvent par les canaux des établissements (Madarisse Attika) en particulier et de l’éducation religieuse en général. » (CSE, 2007, p.20)
Par ailleurs, l’enseignement original[1] (التعليم الأصيل)se différencie largement de l’enseignement traditionnel marocain, car si le premier est dirigé par le ministère de l’Éducation nationale avec cecaractère officiel qui marque l’école issue de l’enseignement original, le second est contrôléet non dirigé, par le ministère des Habous et des Affaires Islamiques, et où l’école ou plutôt la Medersa, a une parfaitequiddité communautaire et contributive.
À l’autre versant, la Medersa peut être considérée comme un lieu d’apprentissage purement authentique. C’est un établissement d’enseignement traditionnel dont le nom dérive de « darrasa » et qui signifie « enseigner », elle ne peut que difficilement se confondre avec les autres établissements d’enseignement traditionnels comme la Mosquée, la Zaouïa ou même le Ribat, car la Medersa se sépare organiquement des lieux de culte pour se focaliser seulement et uniquement sur sa propre mission d’enseignement et d’apprentissage, et le « Waqf »[2]restesubséquemmentle moyen de financement privilégié pour ce type d’école.
Ce faisant, l’histoire de l’apparition du Medersa au Maroc reste confuse,puisqu’on évoque le 5e siècle de l’hégire (السوسي، 1960،ص.17)à l’époque des Almoravides, avec l’écoleSidi Waggâg Ben Zellou (السعيدي،2006، ص.25), ou même le 6esiècle (برادة،2007،ص.135), voire le7esiècle de l’hégire (أسكان،2004، ص.60) avec l’école situéeà Ceuta.
Cette confusionconceptuelle, épistémique, et même éducative, nous amèneàexplorerfinement cet objet d’étude, en formulantalors la problématique suivante :
À quelle lecture éducative peut-on soumettre l’histoire de l’enseignement traditionnel marocain ?
La méthodeadoptéetiendra alors des spécificités du champ d’études,en se centrant sur les dimensions qualitatives de l’objet. Ainsi, notre démarche sera-t-elle aussi bien analytique qu’interprétative en mettant en avant deux hypothèses de recherche, et qui porte l’une sur la richesse de l’enseignement traditionnel marocain que ce soit sur-le-champéducatif, pédagogique ou même didactique et de l’autre, qui perçoit l’enseignement traditionnel marocain comme un fardeau identitaire, regroupant un mélange et un mixtede pratiques arriérées qui doivent être oublié par méthode.
En espérant ainsi contribuer par l’entremise de cette recherche, à apporter des réponses à des questions qui restentd’actualité commela langue d’enseignement à adopter, les méthodes d’enseignement les plus appropriées, la surchargedes programmes scolaires, la gratuité de l’acte d’enseignement et l’obligation de rejoindre les bancs de l’école.
- Les conquêtesislamiques[3], du choix au surchoix
L’histoire du Maroc est riche et complexe, les conquêtes islamiques en font largement partie. Cette phase d’histoire s’est relativement divisée en deux étapes essentielles :
L’« étape des conquêtes islamiques »[4] s’est faite dans un laps de temps bien déterminé et avec des objectifs concis et précis, et l’autre partie de l’intervention islamique s’est déroulée alors de façon bien réfléchie et organisée, mais surtout selon une portée purement stratégique.
Cependant, ce qui est aussi très intéressant à identifier dans cette période d’histoire marquée par l’influence orientale et par les premiers débuts de la dynastie Idrisside, c’est l’apparition de deux niveaux d’évolutions systémiques.
D’une part, le premier niveau d’analyse consiste dans la genèse et l’apparition de la vraie identité actuelle du Maroc, et qui a dû survenir et se développer depuis cette phase. D’autre part, on note désormais cette volonté jadis de construire un état unique et souverain sur la somme des groupements politiquement répandus.
Ce Makhzen, cette administration centrale qui est nouvellement échafaudée a contribué de façon rationnelle à soutenir l’enseignement traditionnel, puisque cette forme d’enseignement est désormais adossée à un agencement politique qui lui faisait défaut avant.
Car au départ, c’est «Oqba Ibn Nafi Al Fihri » en 62 de l’hégire (العروي، 1996) qui a pu instituer l’enseignement traditionnel au Maroc, en introduisant quand bien même, l’Islam et la Mosquée. Ce lieu de culte peut être considérécomme le premier établissement d’enseignement traditionnel au Maroc.
Ce même auteur ajouteen outre, que c’est avec « Moussa Ibn Nosaïr » en 85 de l’hégire que l’intervention islamique a pris touteson ampleur et ipso facto, l’enseignement traditionnel marocain, puisque désormais, cette forme d’enseignement dispose d’un bon nombre d’enseignants adroits et qui ont accompagné cet émir pour s’établir au Maroc.
Ainsi, les premiersenseignants traditionnels dans un indubitable système éducatif marocain coordonné, étaient d’origine arabe, dont la pratique éducative traditionnelle portait généralement sur ce qui se faisait dans l’Orient, et le contenu enseigné portait principalement sur le Coran et la langue arabe, en s’accotantorganiquement sur l’orale et la mémorisation, comme moyenpour enseigner et pour faire apprendre.
L’enseignement de la langue arabe dans l’enseignement traditionnel marocain avait toute sa raison d’être, puisqu’il permettait d’apprendre le Coran et de faire entendre l’Islam. Pourtant, on doit soulignerà ce niveauque la langue arabe était essentiellement une matière à enseigner, sans être perçueni utilisée comme une langue d’enseignement.
Car il y avait un apprentissage àtravers certaines langues, qui subsistaientavant l’intercession de la langue arabe (la langue Amazighe). Cette cohabitation linguistiqueédifiante a pu alors améliorer considérablementles résultats de l’enseignement traditionnel marocain, du fait que cetterésolution pédagogique a nivelél’apprentissage des apprenants qui n’étaient pas habituésà la langue du Coran.
L’enseignement traditionnel marocain a été marquéaussi à cette époque, par la confection d’un très grand édifice éducatif et qui n’était rien que la « Mosquée Al Quaraouiyine »[5], symbolisant ainsi « la plus ancienne des établissements d’enseignement supérieur en Afrique. » (حركات، 2000، ص.124)
Érigée à Fès au troisième siècle, 245 de l’hégire (ابن شقرون، 1994، ص.5) par « Fatima Al-Fihriya » et dont l’enseignement traditionnel marocain a pu trouver refuge ; puisqu’elle n’a pas seulement permis de former des esprits de mérite, d’origine marocaine ou étrangère, mais elle a aussi impacté les institutions éducatives traditionnelles existantes. Puisque « l’enseignement, dans certaines d’entre elles, n’était pas indépendant de celui donné à l’université de la karaouiyine, car certaines matières étaient enseignées en même temps dans les deux institutions, ceci était dû aux échanges qu’il y’avait entre les oulémasde ces zaouïas (établissement d’enseignement traditionnel) et ceux de la Karaouiyine. »(Bey-Boumezrag, 1983, p.8)
Le cheminement et l’évolution qu’a connue cette mosquéereflètent en partiela tendanceet la propension que l’enseignement traditionnel marocain a pu éprouver, tout au long des différentes dynasties qui ont traversé ce pays.
Les tensions politiques et les querelles internes autour du pouvoir ont chagrinégénéreusementl’État Idrisside, et inductivement l’enseignement traditionnel marocain, mais ce qui l’a impacté le plus à cette époque charnière de son évolution, c’est cettecarencecruelled’étai financier accordé aux apprenants traditionnels, et qui devaient joindre laborieusemententre études et travail, pour être à même de subvenir aux exigencesde leursformations.
Ce qui ne pouvait qu’atermoyer l’évolution de cette forme d’enseignement et quisera indubitablement l’objet d’une remise en cause au sein des dynastiessubséquentes.
- Les Almoravides et les Almohades, du choix à l’outre-choix
- La dynastie Almoravide
L’enseignement traditionnel marocain a connu un insignerayonnement à l’époque des Almoravides, que ce soit en termes de méthodes d’enseignements ou de contenus enseignés.
Puisque c’est à cette époque que l’enseignement traditionnel a ébauchégéométriquement les sciences exactes, l’art, mais aussi la littérature, tous en entretenant le contenu liminairecorrespondantaux sciences religieuses.
À l’autre versant et en termes de méthode d’enseignement, c’est la première fois que l’enseignement traditionnel marocain a connuautant de richesse méthodologique. On peut releversubséquemment plusieurs méthodes d’enseignement traditionnel, que les institutions d’enseignement à l’époque des Almoravidesont pu explorer, en mentionnant6 méthodes d’enseignement :
- La méthode lexicale ;
- La méthode du Kairouan ;
- La méthode Iraquienne ;
- La méthode de Fès ;
- La méthode de l’Andalousie ;
- La méthode Marocaine.
Il ya lieu à ce niveaude mettre l’accent sur un point raffinant l’ère des Almoravides, puisque c’est à cette datescolastique, que l’enseignement traditionnel marocain a connu une probevolition pour en massifier l’accès (la démocratisation de l’école), et le rendre le plus proche possible des différents apprenants potentiels, nonobstant de la frange à qui les formésse rapportent.
Ceci s’est capitulépar l’entremise d’une germinationen nouveau moyen de financement, adressé à l’égard des établissements d’enseignements traditionnels, et qui se hèletrivialement pardu« Waqf ».
Ce faisant, on peut mettre clairement en évidencetrois points qui dérivent de l’adoption de ce moyen de financement :
Figure 1. Les trois principaux points qui ont suivis l’adoption et l’adaptation du Waqf par l’enseignement traditionnel marocain |
D’emblée, il y a lieu d’observer la solidité du montage financier que les établissements d’enseignement traditionnel ont récolté, et ce qui a pu s’élever à son apogée à l’époque des Almoravides. Un financement éducatif qui peine à se bonifier, et qui ne cesse de flanchermalencontreusement pour l’école marocaine du 21e siècle.
Par ailleurs, on est tenu à spécifier en deuxièmes points que l’essor du Waqf a permis un redressement de qualitéen enseignement traditionnel marocain, puisque désormais, l’apprenant et l’enseignant peuvent conséquemment se donnerpleinement à l’apprentissage et à l’enseignement traditionnel, sans se morfondre en budget et en frais scolaires. L’enseignement traditionnel marocain a atteintpar ricochet un niveau extrême en gratuité de service, et le maitreest rémunéréitérativement et régulièrementà l’aide de l’argent du Waqf.
Comme troisièmes points, le Waqf a contribué à étendrel’enseignement traditionnel marocain,en participant à l’émergence pour la première fois au Maroc des écolestraditionnelles marocaines ; des écoles qui sont désormais séparéeset écartées des édifices religieux, et qui ont étéapostrophés communément par «Madarisse Attika ».
D’un autre côté, la tradition de l’enseignementmarocainva connaitre à cette même date,l’émergence d’un habitus éducatiftouchantprincipalement le processus d’apprentissage traditionnel des princes et des émirs, mais aussi de ceux qui étaient intimement proches du sceptre, et ceux à travers ce qu’on peut designer par « précepteurs et gouvernants » (المؤدبين).
Ces précepteurs et gouvernants reflètent ce qu’on peut qualifier par allégorie, d’enseignants préscolaires et primaires, mais ceci portaitintrinsèquementsur des apprenants cibles assez précieux, puisqu’il s’agit bien évidemment d’enfants de la gent dominante, une forme d’enseignement traditionnelle reconnue par ses traits qualitatifs éblouissants, et orchestrée par des enseignants pétillants.
Les précepteurs et les gouvernants dans la dynastie Almoravide étaient caractérisés pardeux points :
En premier lieu, on observe que la culture de disposer de précepteurs et de gouvernants au sein de la dynastie des Almoravide, est devenueune conduite accoutumée au centre de l’enseignement traditionnel marocain, et qui se transmettaitspontanément de génération en génération, nonobstant des faits et des conjonctures éphémères.
Puis après, on peut constaterquecette volonté de disposer de précepteurs et de gouvernants à l’époque de la dynastie Almoravide, n’a pas concerné bonnementles apprenants qui se morfondaient pour s’installer au trône (les princes et les émirs), puisque cette pratique s’étirait aussi à ce qui avaient les moyens de recourir au service de ce type d’enseignant.
- La dynastie Almohade
À l’époque de la dynastie Almohade, il faut scander un point délectantà disséquerdans l’enseignement traditionnel marocain, et qui le distingue sempiternellement des autres dynasties qui ont su régner sur ce pays.
Puisqu’avant, l’enseignement traditionnel se faisait par l’intermédiairede la langue arabe et la langue amazighe, mais aussi à traversd’« anciennes langues »[6],qui existaient déjà avant la conquêteislamique, ceci va changer catégoriquement avec la dynastie Almohade, puisque désormais, les langues d’enseignement seraient uniquement et seulement la langue arabe, mais aussi amazighe, et ce qui a eu des effets surl’enseignement traditionnel marocain, et partant, sur l’avenir de tout unpays.
Pour ce qui est de l’apprentissage de la langue arabe, il a pu parvenir à son apogée, particularisantdavantagecette dynastie, et ce qui atteste encore une fois de plus, de la validité et de l’efficience de l’enseignement traditionnel marocain et de sa propre habilité à atteindre les finalités etles objectifs éducatifs assignés.
À l’autre versant, et pour ce qui est du contenu enseigné, on peut indiquer à ce niveaul’essorcapital des « Moutounes » (المتون), et qui peuvent être considéréamplement comme des manuels scolaires à caractère traditionnel, et si les programmes d’enseignement traditionnel se sont déjà développés dès le 2e siècle de l’hégire(حمداوي،2010، ص.53), les « manuelles scolaires traditionnelles »illustraient pleinement l’époque des Almohades.
Les précepteurs et les gouvernants représentaient pour certaines franges de la population, ce volet préscolaire et primaire, concernant l’enseignement traditionnel marocain, et qui ne faisait rien que prépareravec cautèle, l’apprenant à prétendre à une autre formation de mérite,après avoir terminé définitivement ce cycle avec succès. C’est une formation professionnelle à connotation traditionnelle et qui s’est dessinée aussi et avec secondaritétout au long de l’histoire de l’enseignement traditionnel marocain, et qui a pu atteindre son summumau cours de cette époque, puisqu’une telle formation traditionnelle « conflue entre l’enseignement scientifique et littéraire et de la formation militaire, de manière àourdir les apprenants de façon à assumer des postes légionnaires, mais aussi d’érudition, c’est une formation purement fonctionnelle et pratique. »(أسكان، 2010، ص.39)
C’est ainsi donc, que dans l’époque des Almohades, on faisait appel à presque 3000 enfants studieux de tout le royaume, pour vivrepleinement une formation professionnelle, à côté des princes etdesfuturs rois, et de s’agripperpour autantaux postesfats au sein du Makhzen, ce qui nous retrace la logique actuelledu « collège royal » dans la dynastie alaouite.
La formation traditionnelle à connotation professionnelle ne doit pas être confondue candidement avec ce qui prédomineactuellement au cœur du système éducatif. Puisque ce type de formation n’est pas soumis aveuglement au caprice conjoncturel du marché, ni aux diktatsde la firme, du moment où au sein même de l’enseignement traditionnel professionnel« les profils et les débouchés continuent l’école et sont, en principe, transcendé, presque décontextualisé, continué par les impératifs de la communauté, et non par les besoins du marché. » (Bel Lakhdar, 2017, p.11)
À l’époque des Almohades, l’intérêt porté au savoir et à l’enseignement traditionnel était effarant, dans la mesure où même Dar Al Moulk (دار الملك) qui abritait le pouvoir politique et militaire s’est révolutionné graduellement à Dar Al Ilme (دار العلم), et ce àtravers ce qu’on peut appelerpar « conseils scientifiques ».
Ces conseils scientifiques réunissaientautant d’éminents oulémas et d’ébouriffants scientifiques, invoqués de toutes les régions du pays, et qui étaient présidés et tenusfréquemment et communément par les rois, princes et émirs. Cependant, il y a lieu de faire observer l’importance et les différents viatiques de ces conseils scientifiques sur la vie de l’enseignement traditionnel marocain :
Figure 2. Les trois effets majeurs des conseils scientifiques sur l’enseignement traditionnel marocain |
- Le contenu pluridisciplinaire
Il faut indiquer que c’est à travers ces conseils scientifiquesque la richesse concernant les champs et les disciplines scolaires étudiés au giron de l’école traditionnelle, a pu atteindre son niveau le plus extrême, en termes de diversité et de « pluralité disciplinaire »[7], et dont l’appropriation de la philosophie par l’enseignement traditionnel marocain comme matière à enseigner et à étudier,peutcaractériser par définition cette époque, et être son archétype le plus parlant.
Car le fait d’acquiescer la philosophie comme discipline scolaire, tire toute sa dimension de la nature même de l’enseignement traditionnel marocain.
Un enseignement traditionnel qui est jaugécommeune forme d’apprentissage régentée par le volet confessionnel, et entre l’enseignement religieux et la philosophie, une poignée d’incultes peuvent trouver clivages et zones de conflits, d’où l’étoffe de considérer cette grande diversité et béance, que l’enseignement traditionnel marocain a pu manifester, et ce qui a permis de disposerdès lors, d’un bon nombred’esprits scientifiquescyclopéens, comme « Ibn Rochd »[8].
- La recherche scientifique
Les conseils scientifiques étaient administrés par Mezewar Al Talaba (مزوار الطلبة), et ce qui rappelleà peu près, le ministre de l’Éducation et de la Recherche scientifique à l’âge actuel des alaouites, car oui la recherche scientifique a eu aussi une place de choix au cœur de l’enseignement traditionnel marocain, et qui a été enhardiexpressémentpar la tenue de ce type de conseil.
C’est à la lumièrede ces conseils scientifiques, que d’édifiantesproductions scientifiques (des livres et des œuvres), et dans différentes disciplines ont été rédigé par impulsion des rois et des émirs, et qu’un bon nombred’oulémas et d’hommes de sciences, ont été avivématériellement pour qu’ils puissent maintenir leurs quêtes scientifiques.
- L’émulation éducative
L’audience accordée à l’apprentissage traditionnel par les rois et princes, et à la tenue itérative des conseils scientifiques a éveilléintrinsèquement(a)l’esprit savant, (b)le formé, mais aussi (c)le simple justiciable, et ce qui a donnénombre d’importance à l’enseignement traditionnel marocain.
Les oulémas et les scientifiques(a)s’évertuentalors àconserver leurs postes au sein de ces conseils, considération faite,des commodités échafaudées à leurs égards, et pour les autres oulémas et scientifiques et qui n’ont pas eu le vasistasà ces conseils, ils s’efforcentàse démarquer scientifiquement pour y accéder.
Par contre pour l’apprenant traditionnel(b), il s’attacheinstinctivement à s’apparenter à son maitre et qui a eu l’opportunité de les joindre, en fournissant quand bien même, plus d’efforts dans son parcours estudiantin traditionnel, avec cetteprofonde mesure detalonner l’allure de son enseignant, et pource qui est enfin dufutur apprenant traditionnel(c), qui peut adhérerad litteram àl’enseignement traditionnel marocain, rien que par mimétisme aux meneurs.
- Les Mérinides et les Alaouites, du choix à l’autre-choix
- La dynastie Mérinide
L’âge des Mérinides a comporté dans son cœur une rocambolesque ironie de la providence, et une avérée composition dialectique hautementsymbolique, touchant à jamais l’enseignement traditionnel marocain. Enaboutantà la fois entre épanouissement(a)et capitulation(b), l’enseignement traditionnel marocain a enduré une hydre racornie. En revanche il a appareillébien avant, sous l’étendard de l’aboutissement et de la gloire.
En effet, l’enseignement traditionnel marocain a récoltéà cette date, une factuelle mobilisation sociale autour de l’école(a), et d’une indéniable implication effective du simple sujet, en passant graduellement aux esprits scientifiques et en affluant aux grands notables de ce temps.
Ce qui s’est traduit dans un premier temps, par un atavisme ébouriffant à érigeretà assurerlasubventiondes établissements d’enseignement traditionnels, que ce soit dans un biotope urbain que rural. Enconcourant pleinement « à tonifierl’effusion des écoles dans toutes les contrées rurales dès le 8 siècles de l’hégire, et en éprouvant de l’affinité à l’égard des tribus qui s’engageaientenvers les écoles et de leurs propres apprenants, et ceux en abrégeantde suite leursimpôts.» (برادة، 2007، ص.136)
Ce qui a assuré un aplomb et une méritoireventilation géographique des établissements d’enseignement traditionnels sur les cantons de ce pays. Un système d’enseignement marocain et qui a plantureusementtrainéà se moderniser actuellement, en trouvantconséquemment du mal à parveniraux résultatsque l’enseignement traditionnel marocain a déjà connus.
L’enseignement traditionnel a accompli un tournant importantavec l’enflementà cette date arrêtée, de ce qu’on peut désigneren toutes lettres par «expéditions scientifiques ».
En faisant leurs propresexondements dans la vie de l’enseignement traditionnel marocain pour la première fois en 2e siècle de l’hégire (أسكان، 2004، ص.25), et qui ont connu à l’époque des Mérinidesune virevolteattestée,sous le poids dela masse critique que l’enseignement traditionnel marocain a pu atteindre.
Car si les raisons qui ont poussées en premier lieu à l’entame des expéditions scientifiquesportaient jadis surquelquestourmentsmatériels, et une plausibilité à apprendre gracieusement, mais il y aaussi au fin fond de l’islamun ferment chaste, et qui convieénergiquementàapprendre, et notammenttout apprentissage qui se rapporte directement au cultemusulman.
Ce qui a propulséconséquemment et convenablementle forméàs’évertuer à apprendre malgré la distance à parcourir, et l’enseignant à s’impliquer intégralement malgré les différences à supporter.
Une envie qui a su émoustiller l’action didactiquetraditionnelle, et ce qui a failli gravement à l’école nouvelle marocaine, en subsistantalors au cœur d’une crise motivationnelle et en s’imbibant d’une lassitude profonde et définitive.
Par ailleurs, ces expéditions scientifiques qui faisaient office de formation supérieure à l’époque des Mérinides étaient revigorées scientifiquement par trois mobilesà nuls autres seconds :
Figure 3. Les trois raisons qui ont poussées à l’entame des expéditions scientifiques |
Ce qui a poussé l’apprenant à entamer sa propre expédition scientifique se résume en trois points essentiels :
Avant toute chose, il faut considérer la disetteen œuvresd’étoffe et surtout dans nombre de disciplinescaractéristiquesen terres marocaines, puis subséquemment il faut considérercetteemprisesuprême du vocal au sein de l’enseignement traditionnel, et tertio, il y’a cette portéeconsidérableaccordée àl’apprentissage par l’entremise des insurpassables maitres traditionnels, et qui s’éternisecommedirective absolue au sein de cette forme d’enseignement.
À cette mêmeépoque l’enseignement traditionnel va chérir un autre moyen didactique et qui est nommé par du« Tarare ou Hawachi » (الطرر أو الحواشي).
Ceci n’est rien qu’un ensemble de notes, que les formés ont tracées, lorsqu’ils assistaient aux cours d’éminents maitres, ou en abrégeantaussi à l’avenant leurs insignesproductions scientifiques, et ce qui a emportépar ricochet un grandiloquentessor didactique à cette même date.
Ce qui a désorganiséainsi et à maintes reprises les apprenants, en les incitantà ne plus fréquenter ni maîtres, ni établissement d’enseignement traditionnel, et à résignerabruptementaux expéditions scientifiques. En se vouantpleinement àun apprentissage qui reposeexclusivement sur ces naissants moyens didactiques (Tarare)et ce qui a concouruensuivant, à induire l’enseignement traditionnel marocain vers le bas-fond, symbolisant de la sorte, la secondetransition(b)de l’enseignement traditionnel marocain et qui a été déjà alléguéen esquisse.
- La dynastie Alaouite
Cette époque a connu deux étapes clésau sein de l’enseignement traditionnel marocain, marquée par un avant et un après-protectorat, et ce qui a chamboulé pleinement cette forme d’enseignement.
La première phase a donné nombre d’importance aux réformes et contre-réforme éducative, comme celle qui a été initiée par « Mohammed Ben Abdellah » en 1203 de l’hégire(حمداوي،2010، ص.28), mais aussi avec celle de « Slimane Ben Mohammed ».
La Mosquée Al Quaraouiyine a connu aussi à cette époque un bon nombre de réformes, mais il y a lieu de souligner l’importance du volet organisationnel et qui a dû apparaitre avec force, et cedepuis le sultan Mohammed Ben Abdellah, en déterminantet en fixant aussi le contenu enseigné et les manuels utilisés.
Mais à part ceci, on peut noter l’apparitionpour la première fois de l’imprimerie à Fès à l’époque d’« Abderrahmane Ben Hicham », et qui a provoqué par ricochet une relative abondance des livres et des manuels scolaires.
Pour ce qui est de la pratique des précepteurs et de gouvernants au sein de l’enseignement traditionnel marocain à l’époque des Alaouites, ceci a connu une autre évolution, puisque désormais les princes et les émirs sont pris principalement en charge par des précepteurs et des gouvernants « étrangers ».
Depuis la dernière occupation étrangère, le Maroc a commencé à souffrir pleinement de la division de son système éducatif, puisqu’il y avait deux types d’écoles pour un seul et unique pays.
L’état de l’enseignement traditionnel a poussé en outrecertains auteurs à considérer que « l’école traditionnelle au Maroc depuis l’indépendance jusqu’au jour d’aujourd’hui, n’a pas occupé sa propre place sociétale et son importance méritée dans les différents plans du gouvernement marocain à cause de l’intéressement accordé à l’enseignement moderne en dépit de l’enseignement traditionnel et original, mais aussi à cause de la non-employabilité des jeunes issues des écoles traditionnelles. » (حمداوي، 2010، ص.37)
Cequi a amenéalors l’état marocain et sous plusieurs raisons (politique, sécuritaire, religieuse et enfin éducative), a adopté le 29 janvier 2002, la loi 13-01 qui réorganise à nouveau l’enseignement traditionnel au Maroc.
Conclusion :
Entre désir et désespoir l’enseignement traditionnel marocain a su tracer son destin, puisqu’on a ébauché à une phase d’éclosion, pour emprunter la voie de la jeunesse, et en effleurant subséquemment la lisière de la vieillesse.
Un certain âge acquis et qui n’est nullement le prélude d’un trépas approchant, mais c’est rien qu’un temps de recul rédempteur, qui symbolise l’entrain d’un enseignement qui a pu traverser les péripéties des temps, en un souffle qui se compte en siècles.
La tradition de l’enseignement marocain a été particularisée en temps Idrisside par l’établissement fugace de nombre de pratiques éducatives révolutionnaires, et qui ont été institutionnalisées hâtivement à l’époque des Almoravides et enrichies dans l’ère des Almohades, pour être pérennisées à l’âge des Mérinides, et en les compulsant à la date des Alaouites.
Ce faisant, l’enseignement traditionnel marocain n’est rien que le reflet de la société marocaine et le prodrome du décor politique prégnant, il en réverbère convenablement son présent et laisse présager son avenir, car si l’école modernisée est l’apanage du gouvernant, l’école coranique est le denier du gouverné, et que lacomplexion propre à l’enseignement traditionnel marocain englobe nombre de facteurs sociopolitiques révélateurs de l’époque étudiée (à titred’exemple, les Alaouites).
L’enseignement traditionnel marocain a du adjoindre nombre de pratiques modernisées et modernisantes, libre et libérateur. En emboitant alors de la formation initiale à de la formation continue, de l’apprentissage des enfants à celle des plus âgés, que ce soit pour les hommes oupour les femmes, en forgeant dans la même ligne une manne financière robuste(Waqf)pour le bien de l’école maisaussi pour la recherche scientifique (par l’entremise des conseils scientifiques), et en s’appropriant enfin du contenu profane pour enrichir sa fraction primitive (le sacré).
En apportant ci-devant et depuis un certain temps, des réponses judicieuses à des questions qui demeurent d’actualité, comme celle relative à la langue d’enseignement, la surcharge scolaire, l’armada des finalités éducatives, la gratuité de l’école, mais aussi le degré en liberté à l’école, par l’école et pour l’école.
Des questions qui restent toujours d’actualité et qui appellent de ces vœux, des justes réponsesadaptéesetadoptées, et comme un train qui ne peut jamais aller nulle part, « accuser le traditionnel de tous les maux est un fourvoiement philosophique et politique.» (Bel Lakhdar, 2017, p.15)
Bibliographie générale
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- حمداوي، جميل (2010)المدارس العتيقة بالمغرب. مكتبة المعارف.
- السوسي، محمد المختار (1960) سوس العالمة. مطبعة فضالة، المحمدية.
- العروي، عبد الله (1996) مجمل تاريخ المغرب. المركز الثقافي العربي.
[1]Ce type d’enseignement compte seulement et uniquement 16 collèges en 2012, et cedepuis 1973, la date qui marque le début de l’enseignement original sous l’égide du ministère de l’Éducation nationale, voir :
- بوعبدلاوي، أحمد (2016) نحو خريطة متكاملة للتعليم الديني بالمغرب. المركز المغربي للدراسات والأبحاث المعاصرة، ص.65.
[2]Le Waqf ou Habous, c’est une donation offerte à perpétuité dans le but de financer une activité philanthropique.
[3] الفتوحات الإسلامية.
[4]Nous n’entendons nullement par l’« étape de conquêtes islamiques », une simple duréecirconscrite, avec des résultantestrès bien abouties, du moment où chaque processus d’islamisation déclenchédans un pays, est un longdéroulement continu.
[5] Mosquée Al Quaraouiyine ou Mosquée Karaouiyine.
[6]La langue Assyrien comme exemple.
[7] La mosquée Al Quaraouiyine a tiré avantage aussi de cette houle captivante, portant pleinement sur la pluralité et l’aperture à d’autres disciplines nouvelles.
[8] Ibn Rochd ou Averroès, né en 1126 à Cordoue, en Andalousie et mort en 1198 à Marrakech, est un des très grands philosophes de la civilisation islamique et qui a été très bien entouré de la haute sollicitude d’Abou Yacoub Youssouf, le deuxième calife de la dynastie Almohade, et qui avaitune appétence extrême envers la philosophie et les philosophes.